La pomme de terre est l'un des principaux produits d'exportation du Bhoutan. En 2018, ce petit pays enclavé en a exporté 24 970 tonnes, principalement vers l'Inde.

Dans des villes frontalières avec l'Inde, le pays dispose d'un système conventionnel de vente aux enchères pour ses produits et la pomme de terre est de loin le produit le plus vendu. Les pommes de terre, les carottes, les choux‑fleurs et le poivre en vrac recouvrent le sol de ces sites dans l'attente de l'arrivée des négociants et du commissaire‑priseur. Exactement comme vous pouvez vous l'imaginer, le commissaire‑priseur annonce le prix initial et compte jusqu'à trois pour clore les enchères et adjuger le marché.

La matinée s'écoule au gré des ventes qui passent d'un produit à un autre tandis que les agriculteurs attendent à l'extérieur avec leurs camions remplis.

Le matin suivant, les vendeurs reçoivent leurs chèques de la société de vente aux enchères et se rendent généralement directement à la banque pour les déposer. Si les agriculteurs ne vendent pas toutes leurs marchandises le même jour, ils restent en ville autant de jours que nécessaires pour écouler leurs stocks. Pour les négociants, le nombre de camions stationnés dans les environs donne une indication du prix qu'ils devraient proposer.

Le potentiel de renforcement du système était grand, qu'il s'agisse d'améliorer la qualité et l'emballage des pommes de terre mises en vente par le Bhoutan et de rendre les prix plus compétitifs ou de réduire le délai de transaction pour les agriculteurs.

Ces changements visaient tous un même objectif: permettre aux agriculteurs de tirer le meilleur prix possible de leurs récoltes de pommes de terre.

Dans une optique de renforcement, le pays s'est attelé à réaliser ces améliorations en partenariat avec le Cadre intégré renforcé grâce à l'obtention de machines (calibreuses) permettant d'évaluer les pommes de terre, avant de les emballer dans des sacs spécifiques et de les vendre aux enchères en ligne.

Ainsi, 2 calibreuses ont été fournies, chacune d'entre elles ayant une capacité de 20 tonnes par heure. Ces machines, qui contribuent au tri des récoltes, se trouvent désormais au marché aux enchères de la Food Coorporation of Bhutan Ltd. à Phuntsholing, à la frontière avec l'Inde. Les machines ont réduit de quatre jours à quatre heures le temps de préparation des pommes de terre.

Désormais, les agriculteurs peuvent arriver le matin avec leur chargement pour faire calibrer et peser leurs pommes de terre. Ils peuvent ensuite rentrer chez eux. Une fois calibrées et emballées, leurs pommes de terre sont mises aux enchères (en ligne). Les prix sont fixés et les transactions sont adjugées dans l'après‑midi. Les agriculteurs perçoivent leur produit de la vente par le biais de leur téléphone et peuvent l'encaisser à la banque. Ils n'ont donc pas besoin de passer de journées supplémentaires à Phuntsholing.

En 2016, quelque 316 tonnes de pommes de terre ont été vendues aux enchères. Ce chiffre a désormais presque triplé pour atteindre 1147 tonnes en 2017 et 1441 tonnes en 2018. À ce jour, plus de 1600 agriculteurs bhoutanais ont été formés à l'utilisation du système de vente aux enchères en ligne et ont eu accès aux calibreuses, dont 61% sont des femmes. Avec le passage à la vente en ligne, le pays voit également la participation des femmes augmenter.

"De la culture à la récolte, les femmes jouent un rôle important dans le secteur agricole bhoutanais. La participation accrue des femmes aux enchères en ligne montre qu'elles jouent un rôle essentiel dans la prise de décisions relatives à la vente de leurs produits sur le marché" a dit Sangay Dorji, responsable du suivi et de l'évaluation du CIR au Bhoutan.

Autre effet constaté: les transactions peuvent désormais être facilitée par un financement.

À Phuntsholing, la Food Coorporation of Bhutan Ltd. accorde des petits prêts de préfinancement allant jusqu'à 75% de la valeur des transactions avec des acheteurs locaux ou indiens, les montants étant recouvrés une fois les ventes achevées.

"Contrairement aux enchères conventionnelles, les agriculteurs peuvent désormais recevoir le paiement dans les 24 heures suivant la vente au lieu de devoir attendre deux ou trois jours ouvrables" a dit M. Dorji.

Mme Hang Tran, coordinatrice principale du CIR, a déclaré: "lorsque je me suis rendue pour la première fois au marché aux enchères à Phuntsholing, en octobre 2019, j'ai passé presque toute la journée sur place à observer les enchères traditionnelles dans une cour, la calibreuse de pommes de terre dans un autre espace et les enchères en ligne dans l'autre cour. C'était gratifiant de voir comment cette petite contribution du CIR pouvait changer la vie de milliers d'agriculteurs. Quand la Food Coorporation of Bhutan m'a annoncé qu'elle allait acheter une troisième calibreuse avec ses propres fonds – pour répondre à la demande des agriculteurs – j'ai compris que ce partenariat était une réussite."

En fin de compte, cette initiative a eu pour principal résultat d'accroître les revenus des agriculteurs bhoutanais.

"Les agriculteurs gagnent jusqu'à 30 000 ngultrum (420 dollars EU) de plus par chargement en utilisant la plate‑forme en ligne plutôt que la méthode conventionnelle de mise aux enchères." A dit M. Dorji.