L'accès à l'information par le biais de la technologie pourrait améliorer les rendements et les revenus des producteurs de coton en Afrique
Dans l'histoire de l'agriculture, rares sont les défis qui ont été plus difficiles à relever que les nombreux obstacles auxquels sont confrontés les petits exploitants. Ces obstacles sont notamment l'absence d'intrants de qualité, l'accès limité ou inexistant aux marchés internationaux et le manque de terres à cultiver.
Mais aucun défi n'est plus dévastateur pour les petits exploitants que le manque d'accès à l'information.
Pour que la culture du coton soit une réussite, il faut respecter les meilleures pratiques, avoir une connaissance approfondie des parasites et des maladies, comprendre en détail les caractéristiques des sols locaux et suivre des formations sur la gestion des cultures et la bonne utilisation des pesticides et des engrais.
Étant donné que beaucoup de personnes dans les pays en développement ne disposent pas de ce type d'informations détaillées et actualisées, il n'est pas surprenant que les efforts déployés pendant des décennies n'aient pas abouti à des résultats tangibles. Dans les pays les moins avancés (PMA), l'augmentation des rendements peut avoir un impact encore plus important.
La technologie pourrait aider les producteurs de coton à se doter des outils nécessaires. Le Comité consultatif international du coton (CCIC) cherche à augmenter les rendements du coton en fournissant aux petits producteurs les informations dont ils ont besoin pour cultiver du coton de meilleure qualité et en plus grande quantité, réduire au minimum l'impact environnemental et générer davantage de revenus pour leurs familles.
Nous rassemblons les meilleures pratiques en matière de production de coton à travers le monde pour les formuler dans un langage facile à comprendre et mettons les connaissances scientifiques avancées entre les mains des producteurs de coton – littéralement.
Éliminer le problème de l'analphabétisme
Si l'accès accru à l'internet à haut débit a amélioré la situation des producteurs de coton ces dernières années, il ne répond pas aux besoins des plus vulnérables de tous les petits exploitants: les analphabètes. Pour éviter que certains ne soient laissés pour compte parce qu'ils ne savent pas lire, l'application Soil & Plant Health pour smartphones du CCIC a été créée sous la forme d'un programme interactif basé sur la voix qui fournit des informations par le biais de fichiers audio, de photos et de vidéos.
Lorsque l'application est lancée, sa technologie GPS intégrée détermine d'abord la localisation exacte de l'utilisateur. Cela permet non seulement à l'application de saluer le producteur dans la langue ou le dialecte local, mais aussi d'utiliser le GPS pour recueillir des informations détaillées sur les conditions pédologiques locales et télécharger les prévisions météorologiques. Une fois qu'elle dispose de ces données, l'application peut donner des conseils sur le meilleur moment pour planter le cotonnier et prédire exactement à quoi la plante devrait ressembler chaque jour de sa croissance. Si le coton dans le champ ne se présente pas comme indiqué par l'application, le programme guide le producteur dans un processus de diagnostic du problème.
Changer des vies
Les pays producteurs de coton en Afrique de l'Ouest ont actuellement des rendements de 382 kg/ha, et les chiffres sont presque identiques en Afrique du Sud‑Est. Le CCIC a promis de doubler les rendements dans ces pays et, dans certains cas, de faire en sorte qu'ils atteignent la moyenne mondiale de 780 kg/ha.
Le tableau ci‑dessous illustre l'impact potentiel d'une telle réalisation. Dans la partie gauche sont indiqués la superficie actuelle, le rendement et la production de coton fibre pour 16 pays africains, tandis que les deux colonnes de droite montrent la quantité de coton fibre supplémentaire qui serait produite par ces pays s'ils parvenaient à faire en sorte que leurs rendements atteignent le niveau de la moyenne mondiale. Les cultivateurs verraient leur production plus que doubler, passant de 1,7 million de tonnes à plus de 3,6 millions de tonnes, soit un gain de près de 2 millions de tonnes de fibres sans augmentation de la superficie cultivée.
Les recettes additionnelles générées seraient réparties sur l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement et permettraient de créer des opportunités d'emploi, de réduire la pauvreté, d'autonomiser les femmes, d'offrir de nouvelles possibilités d'éducation aux enfants et donner à des millions de personnes la possibilité d'avoir une vie meilleure.
Pour rendre l'application à la fois plus performante et plus facile à utiliser, le CICC travaille actuellement à y intégrer l'intelligence artificielle. Cela permettrait entre autres aux petits exploitants de télécharger une image d'un insecte ou d'une plante potentiellement malade afin de la faire correspondre à une ou plusieurs des milliers d'images contenues dans la base de données de l'application grâce à l'intelligence artificielle.
Cependant, ce n'est pas vraiment une question de technologie, mais plutôt une question de connaissances. La technologie est un moyen très utile et peu coûteux de diffuser des informations à grande échelle et rapidement, mais, en l'occurrence, l'objectif est de donner aux personnes concernées les outils dont elles ont besoin pour améliorer leurs conditions de vie et celles de leurs familles.
Au Tchad, nous avons travaillé avec des fonctionnaires pour mieux comprendre la situation du coton dans le pays et la façon dont celle‑ci pourrait être améliorée. Cotton Tchad, une initiative publique‑privée associant le gouvernement tchadien et l'entreprise agroalimentaire Olam International, basée à Singapour, met en œuvre un programme visant à doubler les rendements dans un délai de trois à cinq ans.
Améliorer la situation des petits exploitants
Une autre initiative d'information a été lancée sous la forme d'un programme de formation sur le coton utilisant la réalité virtuelle, qui permettra aux producteurs de se promener dans des champs de coton virtuels partout dans le monde, à différents moments de la saison, pour découvrir une variété d'activités agricoles et de pratiques de production. Plusieurs raisons font que la réalité virtuelle est parfaitement adaptée à la formation des petits exploitants dans les PMA:
* Les casques utilisés dans les programmes de réalité virtuelle sont sans fil (aucun ordinateur n'est nécessaire).
* Ces programmes peuvent fonctionner sans accès à internet.
* Ces programmes ont un coût chaque jour plus abordable car ils sont de plus en plus utilisés à travers le monde. Un simple boîtier de réalité virtuelle "Google Carboard" ne coûte que quelques dollars.
En plus de pouvoir voir le cotonnier à différents stades de croissance, les utilisateurs peuvent bénéficier de formations sur des pratiques potentiellement dangereuses – comme le stockage et l'application de pesticides hautement toxiques et d'autres produits chimiques dangereux – sans courir aucun risque lié à l'exposition.
Après avoir recueilli des données sur les conditions météorologiques et pédologiques locales, l'application indiquerait à un producteur: "En se basant sur le fait que vous avez terminé les semis il y a 75 80 jours, votre plante a reçu environ 1 500 unités de chaleur et devrait ressembler à cela aujourd'hui". – Photo reproduite avec l'aimable autorisation du CICC
Enfin, la réalité virtuelle permet d'informer les producteurs sur les différentes maladies et parasites qu'ils sont susceptibles de rencontrer pendant la saison de croissance, notamment en leur permettant d'identifier les insectes bénéfiques qui se nourrissent des parasites qui attaquent la culture.
La technologie peut aider les populations des PMA de bien d'autres façons que par la fourniture de conseils sur la production de coton. L'un des défis les plus importants pour réduire la pauvreté dans les PMA, en particulier en Afrique, consiste à aider les pays à transformer la fibre de coton en textiles, vêtements et autres produits à valeur ajoutée fabriqués à partir de la graine et des tiges de coton. La réalité virtuelle pourrait faciliter le développement d'une industrie de transformation du coton en permettant aux entrepreneurs de "se rendre" dans de petites usines textiles, par exemple, pour se familiariser avec les processus, les techniques et les équipements nécessaires pour transformer les fibres de coton en produits à valeur ajoutée.
La réalité virtuelle peut même être utilisée comme un programme de formation pour les représentants de marques et les détaillants afin de leur permettre de découvrir et de comprendre chaque maillon de la chaîne d'approvisionnement du coton. Ils doivent savoir comment les produits en coton qui se trouvent sur leurs étagères sont arrivés là et ils doivent pouvoir rassurer leurs clients sur le fait que les matières premières utilisées dans ces produits ont été fabriquées de manière éthique et durable. Si l'on aide les représentants des grandes marques et les détaillants à comprendre pourquoi le coton est préférable aux fibres synthétiques, cela ne pourra que profiter à l'industrie mondiale du coton, y compris aux PMA.
Quels que soient les moyens utilisés pour y parvenir, il est primordial de répondre aux besoins des petits exploitants agricoles dans les PMA.
Header image of a nut and seed processing facility in Ethiopia - ©Fernando Castro/EIF
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