12 décembre 2023

Zambie: comment faire son miel de la diversification d'un profil commercial?

by Farai Samhungu Peter Donelan / in Récit d'expérience

PRINCIPAUX RÉSULTATS

  • Le soutien apporté par le Cadre intégré renforcé (CIR) au secteur du miel de la Zambie a permis d'accroître la production, d'améliorer la qualité du miel et de protéger l'environnement. Conséquence directe, les revenus tirés des exportations sont passés de 684 000 USD en 2011 à 6,09 millions d'USD en 2022.
  • Le CIR et le Fonds pour l'application des normes et le développement du commerce (STDF) de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) ont collaboré dans le cadre d'un projet sur les questions sanitaires et phytosanitaires afin de raccorder les entrepreneurs zambiens à une meilleure infrastructure qualité pour les exportations. Par la suite, des myrtilles ont pu être exportées vers l'Afrique du Sud et des avocats vers l'Union européenne, et les moyens de subsistance se sont ainsi améliorés au niveau local.
  • SheTrades Zambie, un projet collaboratif entre le CIR et le Centre du commerce international (ITC), a catalysé les effets d'échelle et entraîné la création d'un deuxième programme du même nom. Les ventes réalisées par les entrepreneuses ont augmenté, 126 emplois ont été créés dans le cadre du premier projet et 12 nouveaux marchés d'exportation ont été développés.

Pendant longtemps, la Zambie a dominé le marché du commerce africain en tant que premier exportateur de cuivre, représentant 70% du volume de la production du continent. Le cuivre compte pour 60% des exportations totales du pays et pour 12% de son produit intérieur brut. Cette dépendance aux industries extractives, conjuguée à des activités agricoles limitées, fait de la Zambie une économie vulnérable aux variations des prix et de la demande au niveau mondial, ainsi qu'aux chocs climatiques.

Grâce au soutien du CIR, la Zambie a intensifié ses efforts en matière de croissance du commerce et de diversification, axés sur plusieurs caps, afin de parvenir à des améliorations systémiques. Ces caps étaient les suivants: premièrement, consolider les liens entre le secteur privé et les pouvoirs publics autour de produits clés comme le miel; deuxièmement, renforcer les capacités institutionnelles du gouvernement et des organisations travaillant dans le domaine du commerce, intégrer le commerce dans le cadre de développement du pays et améliorer l'environnement réglementaire du commerce; et troisièmement, prospecter de nouveaux marchés pour les produits zambiens.

Le renforcement des capacités comme point de départ

Le soutien au gouvernement a commencé par la création puis le renforcement de capacités en vue de mettre en œuvre, de suivre et de coordonner les initiatives d'Aide pour le commerce au sein du Ministère du commerce et de l'industrie (MCTI), et d'élaborer des politiques liées au commerce, notamment la politique commerciale et la stratégie d'exportation.

Le Ministère a également travaillé par l'intermédiaire d'universités publiques pour instaurer un cours sur la politique commerciale et le développement. Dans le cadre de cette initiative, et avec l'appui de la Direction générale suédoise du commerce extérieur (NBT), les enseignants ont suivi le Cours de l'Académie du commerce – un programme avancé sur la politique commerciale organisé par la NBT – pour renforcer leurs méthodes pédagogiques ainsi que leurs compétences en matière de politique commerciale. En collaboration avec le Ministère, la NBT a également apporté son concours à la création d'un manuel harmonisé sur la politique commerciale et le développement. 

Le commerce a été désigné comme l'un des moteurs de croissance de la Zambie. Compte tenu de sa situation géographique de pays "relié par voie terrestre", afin de tirer parti des avantages du commerce, le point de départ devrait être le renforcement des capacités.

Selon lui, le cours développe les capacités et les compétences analytiques des étudiants pour leur permettre de répondre à la demande croissante de connaissances en matière de commerce international une fois embauchés. Plusieurs diplômés de l'Université travaillent maintenant au sein du gouvernement, d'organismes semi‑publics et dans le secteur privé.

Lilian Bwalya, Secrétaire permanente au MCTI, indique qu'avant cette intervention, les diplômés quittaient les bancs de l'université avec un manque de connaissances. Cependant, depuis l'introduction de ce cours, le pays dispose d'un vivier d'experts dotés de connaissances en matière de politiques commerciales internationales et de compétences pour ce qui est de l'intégration du commerce, de l'élaboration des politiques et de l'amélioration des négociations commerciales.

De l'utilité de la diversification économique

Dans le cadre de sa stratégie de diversification économique visant à réduire la dépendance au cuivre, le gouvernement a classé le miel parmi les produits nationaux d'exportation à grande valeur dont le secteur présente un vaste potentiel de croissance. Les apiculteurs, qui ont travaillé en collaboration avec l'Organisation néerlandaise de développement SNV, ont reçu 5 000 ruches modernes, 4 000 tenues de protection, 5 000 seaux de récolte et d'entreposage, et 2 000 enfumoirs. Cela a permis d'accroître la production, d'améliorer la qualité du miel et de protéger l'environnement. 

Le CIR est l'un des rares partenaires de développement qui fournit un dispositif de soutien visant spécifiquement à améliorer les infrastructures de production de miel en Zambie.

Grâce à ces infrastructures, davantage de femmes ont également pu participer à ces activités. Sur la base de l'approche de "la formation des formateurs" et d'une collaboration avec l'École forestière de Zambie, 6 580 apiculteurs ont été formés. En outre, les apiculteurs étaient répartis en plusieurs groupes et ils ont établi des relations durables avec des transformateurs de miel. Dix‑huit centres de collecte ont été mis en place pour assurer des services centralisés d'emballage, d'entreposage et de commercialisation. Grâce à toutes ces interventions, les revenus tirés des exportations sont passés de 684 000 USD en 2011 à 6,09 millions d'USD en 2022.[1] En outre, les réussites du secteur du miel – sous la forme d'une nette augmentation des revenus tirés des exportations et de l'accroissement des perspectives de subsistance pour les producteurs – ont incité d'autres bailleurs de fonds à apporter un soutien financier pour renforcer les chaînes de valeur dans ce secteur. En particulier, le Fonds africain pour le commerce de la Banque africaine de développement a fourni une enveloppe de 1,4 million d'USD avec le soutien du gouvernement du Canada, ce qui découle directement du soutien du CIR.

Le rendement de l'investissement pour les femmes

Aux côtés de l'ITC, le CIR a contribué à lancer l'initiative SheTrades en Zambie, apportant ainsi un soutien catalyseur pour accroître la participation des entreprises détenues par des femmes par le renforcement de leur compétitivité, la consolidation des liens avec les marchés et la promotion de leur inclusion dans les chaînes de valeur de l'agriculture, des textiles et des vêtements. "Dans le cadre du projet SheTrades, des entrepreneuses ont participé à des foires commerciales régionales et internationales où elles ont trouvé de nouveaux marchés pour leurs produits ainsi que des débouchés commerciaux supplémentaires", explique Griffin Nyirongo.

L'initiative SheTrades a permis de former, de guider et d'accompagner 200 femmes, et plus de 400 inscrites dans la base de données ont bénéficié de divers services. Au cours des 18 mois de mise en œuvre, le programme SheTrades a contribué à de nouvelles ventes pour une valeur de 3 millions d'USD, créé 126 nouveaux emplois (dont 79 pourvus par des femmes) et accru les exportations vers 13 marchés régionaux et 12 marchés internationaux en 2020. Le pôle SheTrades de Zambie a noué un partenariat étroit avec l'Agence de développement de la Zambie, un organisme public relevant du MCTI, la structure gouvernementale qui accueille depuis longtemps l'initiative du CIR.

Compte tenu de la réussite de ce partenariat, le CIR a reproduit l'initiative avec l'ITC dans d'autres pays moins avancés (PMA) comme la Gambie et le Rwanda. Si le projet en lui‑même s'est achevé, le MCTI continue toutefois de mobiliser et de cibler des soutiens pour développer les activités des entrepreneuses en participant à des foires commerciales régionales et en menant des missions commerciales exploratoires dans des pays voisins, à la recherche de nouveaux marchés. En 2022, le gouvernement a également reçu le soutien du gouvernement finlandais pour mener deux missions commerciales en République démocratique du Congo (RDC), ce qui a donné lieu à de nouvelles activités dans les secteurs des textiles, de l'alimentation et des boissons, et des vêtements de sécurité. La mission commerciale en RDC s'appuyait sur l'étude de marchés réalisée dans le pays par l'Agence de développement de la Zambie, à laquelle le CIR avait apporté son concours. Le projet SheTrades en Zambie a entamé sa deuxième phase avec le soutien du CIR, et sa durée a été prolongée jusqu'en 2022 et 2023.

Le processus de transformation des coopératives

Dans le cadre du Projet de développement et de durabilité des coopératives, 174 coopératives regroupant 1 864 membres au total ont été transformées en établissements coordonnés, bien organisés et dotés de structures commerciales et de gouvernance. Ces coopératives sont une source d'emplois et de moyens de subsistance pour beaucoup, et elles contribuent désormais à l'économie du pays de manière plus formelle. Comme le dit Griffin Nyirongo, "changer l'état d'esprit des coopératives pour adopter un fonctionnement commercial a été une grande victoire, car beaucoup exerçaient sans aucune structure". Le CIR leur a fourni des services comme la formation d'agents de coopérative de district, ainsi qu'un appui logistique, et il les a mises en lien avec des établissements financiers et d'autres fournisseurs de services. Les agents de coopératives de district dispensent également des formations visant à renforcer les activités des producteurs et transformateurs de miel, d'huiles comestibles, de maïs, d'ananas, de produits laitiers, de moringa et d'or. Cette initiative s'est appuyée sur l'expérience acquise par l'Ouganda, qui avait mis en œuvre un projet analogue grâce au soutien du CIR.

L'amélioration des capacités sanitaires et phytosanitaires stimule les échanges

La réglementation sanitaire et phytosanitaire restreint l'accès aux marchés de nombreux produits issus des coopératives et des entreprises du secteur privé, beaucoup de ceux‑ci étant rejetés, ce qui entraîne des pertes importantes. En partenariat avec le STDF, les autorités zambiennes ont travaillé sans relâche pour remédier aux difficultés liées à la manipulation des produits de l'horticulture, des cultures arables et de la floriculture, et ainsi réduire le nombre de notifications relatives aux parasites détectés. De fait, ces notifications sont beaucoup plus rares depuis 2017. 

Cette coopération a permis de réduire les délais de traitement et les coûts de transport, de renforcer les capacités d'inspection et de conquérir de nouveaux marchés pour les produits de l'horticulture et de la floriculture.

Le gouvernement participe activement à l'élaboration de politiques et de normes phytosanitaires, à la fois au niveau national et avec d'autres pays de la région, ainsi qu'à l'amélioration des capacités dans les services phytosanitaires et de quarantaine, le but étant de renforcer la confiance des partenaires commerciaux, en particulier les États membres de la Communauté de développement de l'Afrique australe.

L'intégration est essentielle à la croissance et à la durabilité

Griffin Nyirongo met l'accent sur la spécificité du soutien apporté par le programme du CIR au gouvernement zambien:

Le CIR a soutenu les efforts déployés par le gouvernement s'agissant d'identifier les secteurs susceptibles de stimuler et d'accroître les échanges, de planifier des activités tout en veillant à ce qu'elles soient intégrées aux stratégies et plans nationaux, de renforcer les capacités pour combler les manques de ressources, de comprendre les chaînes de valeur d'un secteur et d'y apporter un soutien, ou encore de mettre en place les infrastructures nécessaires.

Pour faciliter l'appropriation au niveau national et l'intégration des fonctions et des projets de l'Unité nationale de mise en œuvre (UNMO) du CIR dans les structures gouvernementales, par exemple, le MCTI héberge à la fois la plate‑forme gouvernement‑donateurs et le Secrétariat du Comité national de la facilitation des échanges (CNFE), établi en vertu de la Loi de 2018 sur la gestion des frontières et la facilitation des échanges. Le rôle du Secrétariat du CNFE, équivalent du Comité directeur national, consiste à coordonner la mobilisation des ressources, à mettre en œuvre la matrice des activités recommandées de l'Étude diagnostique sur l'intégration du commerce (ÉDIC), à assurer un suivi des résultats et de l'impact, et à appuyer la mise en œuvre de l'Accord sur la facilitation des échanges. Le Secrétariat du CNFE travaille pour le Comité national de la facilitation des échanges de haut niveau, qui est présidé par le Secrétaire du Cabinet.

Avec l'appui du Marché commun de l'Afrique orientale et australe et de l'Union européenne, le gouvernement met en œuvre des projets régionaux et nationaux d'Aide pour le commerce qui se poursuivront au‑delà du soutien actuellement apporté par le CIR. En outre, le CIR aide le Ministère à élaborer plusieurs propositions d'activités de suivi pour prendre le relais des projets en cours. Afin de hiérarchiser plus facilement les priorités entre les domaines susceptibles d'exiger un soutien, le gouvernement zambien a achevé en juin 2023 une Mise à jour de l'ÉDIC qui sera officiellement lancée d'ici à la fin de l'année et sera axée, entre autres, sur la recherche en matière d'accès aux marchés aux niveaux régional et mondial après la sortie de la Zambie de la catégorie des PMA, et sur les liens entre commerce et changements climatiques. Il s'agit de la troisième ÉDIC entreprise par le pays, qui souhaite mobiliser un soutien auprès des partenaires de développement en faveur des priorités de la matrice d'actions dans les années à venir.

 

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Alors que la deuxième phase du Cadre intégré renforcé (CIR) touche à sa fin en 2024, l'objectif est de produire un catalogue de récits d'impact mettant en lumière les efforts du partenariat du CIR dans les pays les moins avancés (PMA) et les PMA récemment reclassés où il s'est activement investi. Le présent récit d'impact constitue l'un des récits du catalogue. Il a bénéficié de la contribution et des commentaires essentiels de la part des Unités nationales de mise en œuvre du CIR (UNMO) basées dans les pays et de l'ensemble de l'équipe du CIR.

L'objectif premier de chaque récit d'impact, ainsi que de l'ensemble du catalogue, est d'adopter une approche journalistique en relatant l'implication du CIR dans les PMA au cours de la Phase Une et Deux. Le but est de fournir des informations pertinentes et de documenter les résultats et les impacts, ainsi que certains enseignements tirés du travail du partenariat du CIR dans les PMA. Ces récits ne fournissent pas une vue d'ensemble de tous les aspects de l'implication du partenariat du CIR, tels que les calendriers précis ou l'étendue exacte de la participation (c'est-à-dire les contributions financières). Ils constituent plutôt un moyen d'information parmi d'autres sur le travail du partenariat du CIR. Les lecteurs intéressés sont encouragés à compléter ces récits d'impact en consultant d'autres sources, notamment les Rapports annuels du CIR, les articles des Nouvelles de l'Aide pour le commerce, les canaux de réseaux sociaux du CIR et, le cas échéant, les UNMO dans les PMA ainsi que le Secrétariat exécutif du CIR.

Il est essentiel de reconnaître que les informations fournies ne sont ni exhaustives (par exemple, elles sont basées sur les dernières données disponibles au moment de la rédaction en 2023) ni de nature évaluative. 

Enfin, bien que chaque récit d'impact adhère à une structure similaire, la diversité des pays, des contextes et des implications du CIR signifie que chaque histoire est unique.
 

[1] Trend Economy, Annual International Trade Statistics by Country (HS), https://trendeconomy.com/data/h2/Zambia/0409.

Avertissement
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