17 octobre 2024

Des progrès continus apportés par les dividendes de la paix dans le cadre du relèvement du pays

by Kudzai Makombe Paulin Zambelongo / in Récit d'expérience

RÉSULTATS CLÉS

  • Le modèle de la République centrafricaine (RCA) est un excellent exemple des activités d'intégration et de renforcement des capacités menées par le Cadre intégré renforcé (CIR) après un conflit. Le CIR a aidé à établir l'Unité nationale de mise en œuvre (UNMO), qui exerce les fonctions auparavant inoccupées de département de la planification au sein du Ministère du commerce.
  • L'UNMO, qui a été établie au moyen d'un décret présidentiel, sous le nom de Cellule de Gestion de Stratégies Sectorielles et de Projets (CGSSP), aide notamment à actualiser le Plan de développement national et à mettre au point les plans de travail annuels du ministère. Elle est désormais pleinement intégrée dans ce qui est aujourd'hui le Ministère du commerce et de l'industrie, les salaires du personnel étant payés par le gouvernement.
  • Le CIR a soutenu des projets concernant le maïs, le sésame et l'huile de palme, qui ont produit des résultats encourageants et contribué à la création de plus de 11 000 emplois et à une augmentation de la production de sésame, qui est passée de 6 000 tonnes en 2020 à près de 280 000 tonnes en 2022, ainsi que de la production de maïs, passée de 48 000 tonnes à 521 000 tonnes au cours de la même période. Ces résultats ont été obtenus malgré les difficultés liées à la sécurité rencontrées dans certaines localités du le pays.

La République centrafricaine (RCA), vaste pays ne comptant que cinq millions d'habitants, tente de parvenir à une paix durable au moyen du commerce au service du développement pour améliorer les moyens de subsistance et construire un avenir meilleur pour cette génération et les suivantes.

La récurrence des conflits au cours des trois dernières décennies a aggravé les niveaux de pauvreté dans le pays, affaibli la cohésion sociale et posé au gouvernement le défi de reconstruire les institutions, le capital humain, l'infrastructure et les moyens de production. L'élection et l'installation officielle des membres élus de la Chambre de commerce, d'industrie, des mines et de l'artisanat (CCIMA) par le Président en 2009 ont marqué une étape importante dans les progrès réalisés par le gouvernement en vue de redynamiser l'économie. Les acteurs du commerce, qui avaient été frappés par la crise, ont ainsi pu préconiser au gouvernement d'accorder davantage d'attention au commerce et aux échanges, qui font partie intégrante de la consolidation de la paix.

Le partenariat entre le gouvernement de la RCA et le CIR, établi depuis 2005 au titre du Cadre intégré (CI), a œuvré de façon méthodique à l'amélioration de la productivité et au renforcement des institutions en vue de soutenir un commerce favorable aux pauvres, le but étant de reconstruire l'économie et d'instaurer la paix. Il s'agissait d'une relation continue, qui s'est toutefois interrompue pendant la période d'instabilité qui a suivi le renversement du gouvernement en mars 2013. Le partenariat a repris en mai 2018 dans le sillage de la réconciliation nationale et des élections de 2016.

De façon générale, la population a commencé à se rendre compte des avantages découlant de l'approche systématique, qui donne lieu au dialogue actif entre ce qui est aujourd'hui le Ministère du commerce et de l'industrie et les femmes, les jeunes et les communautés les plus pauvres. D'après Edmond Mologodo, coordonnateur de projet du CIR au Ministère du commerce et de l'industrie, certains des premiers résultats sont dus à la ferme détermination du CIR à soutenir la croissance favorable aux pauvres et le programme de consolidation de la paix de la RCA. "Le CIR est le seul programme de commerce international qui fasse preuve de pragmatisme et de souplesse et travaille au plus près des populations locales," affirme M. Mologodo.

Surmonter les obstacles à la reprise

Le renforcement des capacités institutionnelles vise à soutenir le commerce au service du développement, notamment en modernisant les règles et règlements datés en matière de commerce (ou en en élaborant de nouveaux) pour favoriser la croissance. La première étape a consisté à renforcer l'UNMO en 2017 par un décret présidentiel qui a élargi ses fonctions pour devenir une unité de gestion de stratégies sectorielles et de projets. L'UNMO, approuvée au plus haut niveau politique dans le pays et forte de l'engagement pris par le gouvernement de payer les salaires du personnel, fait office de département de la planification au sein du Ministère du commerce. Ce mandat a permis au ministère de veiller à la mise en œuvre efficace du pilier relatif au commerce du Plan national de relèvement et de consolidation de la paix 2017‑2021, qui avait pour objectif de "promouvoir la reprise économique et stimuler les secteurs productifs pour fournir rapidement à la population des activités génératrices de revenus et des possibilités d'emplois".

En outre, l'UNMO a fait en sorte que les priorités relatives au commerce soient intégrées dans les Stratégies de réduction de la pauvreté 1 (2008‑2010) et 2 (2011‑2015). Une stratégie de développement du commerce et de l'industrie couvrant plusieurs domaines, y compris la compétitivité des exportations et la diversification, a été mise au point et adoptée en juin 2019. L'UNMO a en outre favorisé l'intégration du commerce dans les stratégies sectorielles liées à l'agriculture, à l'industrie minière, au tourisme, à l'eau et à la sylviculture.

Stimuler les secteurs productifs en partant de la base

Une fois le cadre politique en place, le partenariat gouvernement/CIR est passé à la mise en œuvre d'un projet catalyseur à l'échelle du pays pour démontrer les possibilités offertes par le maïs, l'huile de palme et le sésame en matière d'amélioration des revenus des petits producteurs. Cet objectif devait être atteint au moyen d'un renforcement institutionnel aux niveaux national et local; d'une formation sur les cadres juridiques et commerciaux, par exemple les normes de qualité pour l'exportation, et sur la commercialisation; et de la fourniture d'outils et de machines.

L'approche suivie pour accroître la production et relever les normes d'exportation a été axée sur la pratique, avec des travaux réalisés dans tout le pays, qui partaient du niveau local. M. Mologodo a expliqué que l'UNMO menait ses activités en s'appuyant sur un processus consultatif participatif. Ce dernier commence par une rencontre avec les autorités politiques et administratives locales afin d'expliquer les objectifs du projet et de recueillir leur soutien. Des réunions de sensibilisation et des séances de formation adaptées aux secteurs sont ensuite organisées avec les coopératives et les entreprises locales. Ce processus permet l'adhésion des autorités locales et des membres de la communauté, ainsi qu'un plus grand sentiment d'appropriation, ce qui aide à renforcer la confiance et la coopération. "L'espoir et l'intérêt des populations pour le projet sont grands chaque fois que nous leur rendons visite," a déclaré M. Mologodo.

Le soutien en matière de commercialisation a permis aux organisations d'agriculteurs de participer à des foires agricoles dans la capitale, Bangui, et dans les régions. Des entrepreneuses et des jeunes ont reçu des formations en matière de développement et de planification des activités commerciales. Une campagne de sensibilisation menée dans les zones d’intervention du projet tout le pays a encouragé les producteurs, les transformateurs, les transporteurs et les exportateurs à dialoguer avec les directions régionales du Ministère du commerce et de l'industrie.

L'établissement de coopératives a été particulièrement utile dans le cadre du projet de partenariat. Environ 428 groupes – 247 dans le secteur du maïs, 126 dans le secteur du sésame et 55 dans le secteur de l'huile de palme – ont été organisés en 27 unions et coopératives.

Les coopératives ont perçu un soutien financier pour des travaux de labourage, de défrichage et d'entretien des cultures. On leur a également fourni des semences et d'autres intrants et équipements agricoles, y compris de l'équipement et du matériel pour la production d'huile de palme et l'emballage des produits. Des entrepôts de stockage ont été construits et, pour faciliter la fourniture de services de vulgarisation dans ce vaste pays, les responsables des départements régionaux se sont vus attribuer des motocycles.

Le projet a autonomisé des productrices agricoles et des anciens combattants démobilisés, parmi lesquels des jeunes, dans tout le pays. La majeure partie de la population rurale de la RCA dépend de l'agriculture pour ses moyens de subsistance, et la responsabilité des cultures incombe principalement aux femmes. La formation dispensée aux membres de l'Organisation des femmes rurales "Fleurs de Centrafrique" et de la fédération des maraîchers de Ngoulekpa, par exemple, a permis aux femmes de mettre en place des points de vente pour leurs produits aussi bien à Bangui que dans les régions. Elle les a également aidées à maîtriser de meilleures pratiques dans le domaine de la commercialisation des produits agricoles.

Les anciens combattants qui ont opté pour le travail dans l'agriculture dans le cadre du programme national de désarmement, démobilisation, rapatriement et réinsertion ont rejoint ou formé des coopératives comme moyen d'éviter le conflit, ce qui contribue à relever un secteur précédemment ravagé par la guerre. Les interventions ciblant la jeunesse consistent notamment en des visites dans des écoles pour discuter avec les étudiants de la culture du maïs, du sésame ou du palmier et d'autres possibilités offertes par le petit commerce. D'après Léa Koyassoum Doumta, Ministre du commerce et de l'industrie, le projet apporte des revenus importants aux femmes et favorise l'intégration socioéconomique des jeunes dans les régions couvertes par le projet en empêchant qu'ils soient enrôlés dans des groupes armés.

Les exportations de maïs et de sésame soutenues par le CIR, principalement vers le Tchad, le Soudan et le Soudan du Sud, sont en augmentation. Dans le même temps, l'accroissement de la production de maïs a permis à l'Huilerie savonnerie de Centrafrique (HUSACA), une entreprise du secteur privé, d'être approvisionnée en continu à des fins de transformation et de vente au Programme alimentaire mondial. Entre 2020 et 2022, la production de sésame est passée d'un peu plus de 6 000 tonnes à près de 280 000 tonnes, tandis que celle du maïs est passée de 48 000 à 521 000 tonnes. Une usine de production d’huile de palme d’une capacité de 250 à 300 par an est entièrement installée à 35km au sud-ouest de Bangui sur financement du CIR va stimuler la chaine de valeur de cette filière. Tout cela a permis la création de plus de 11 000 emplois, ce qui contribue à consolider la paix dans le pays.

Aller plus loin ensemble

Chemin faisant, le gouvernement de la RCA et le CIR ont renforcé les partenariats existants et en ont conclu de nouveaux. Ils concernaient notamment les partenaires institutionnels du CIR, par exemple la Banque mondiale en tant que principal partenaire de mise en œuvre pour la réalisation de la première Étude diagnostique sur l'intégration du commerce (ÉDIC), le Programme des Nations Unies pour le développement en tant que principal partenaire de mise en œuvre pour la mise à jour de l'ÉDIC, et le Centre du commerce international, qui a mené une étude sur le potentiel d'exportation de la RCA. L'Union européenne a également apporté son soutien à l'élaboration d'une stratégie commerciale post‑conflit.

À première vue, la contribution du CIR au renforcement des compétences techniques du secteur privé et à l'amélioration de la production et de la commercialisation du niveau local aux secteurs de la transformation et de l'exportation a permis de mobiliser un soutien à plus grande échelle auprès d'autres partenaires de financement. Toutefois, d'après M. Mologodo, elle est allée bien plus loin:

Le partenariat a joué un rôle majeur dans le renforcement de la cohésion sociale entre les communautés. Les interventions réalisées sur le terrain au titre des projets ont permis à des groupes de populations qui se sont mutuellement harcelés pendant la crise politique et sécuritaire de 2013 à 2016 de mieux vivre ensemble dans le centre et le nord du pays.
Credits
Photo © ADRIENNE SURPRENANT/MYOP
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