18 juillet 2023

Au Bénin, analyse du renforcement du commerce transfrontières et produits de niche de qualité destinés aux marchés internationaux

by Kudzai Makombe Paulin Zambelongo Simon Hess / in Récit d'expérience

PRINCIPAUX RÉSULTATS

  • Le Cadre intégré renforcé (CIR) a aidé le Bénin à mettre à jour son étude diagnostique sur l'intégration du commerce (ÉDIC) en 2015. Cette mise à jour a conduit, entre autres, au renforcement de l'unité nationale de mise en œuvre (UNMO) du Bénin et à la réalisation d'une importante étude sur le commerce transfrontières axée sur la facilitation des échanges et le renforcement de la dynamique commerciale régionale. Se fondant sur les recommandations de cette étude, le gouvernement béninois a prélevé environ 7 millions d'USD sur le budget national pour l'exercice financier 2023 dans le but de démarrer la construction du premier espace marchand transfrontalier sur l'une des frontières sud avec le Nigéria. Ce résultat démontre le rôle joué par le CIR en matière de renforcement des capacités institutionnelles et de facilitation de l'appropriation par les pays.
  • Avant que le CIR ne commence sa collaboration avec le Bénin, le pays n'avait pas d'association nationale dans des filières clés telles celles du karité, de l'ananas ou de la noix de cajou. Le CIR a contribué, avec l'appui d'autres partenaires comme l'Union européenne (UE), le Centre du commerce international (ITC) et l'Organisation néerlandaise de développement SNV, à l'établissement d'associations professionnelles nationales ("interprofessions") dans ces filières et a fourni un soutien pour mobiliser les secteurs public et privé et les partenaires de développement. Le cas du secteur du karité a été très instructif en matière de partenariat grâce aux interventions ciblées de l'Alliance globale du karité, une organisation non gouvernementale (ONG) qui compte de grandes entreprises actives dans ce secteur.

"Le Bénin offre de nombreuses possibilités. Il compte de nombreuses chaînes de valeur pour améliorer les échanges", a déclaré avec enthousiasme Euloge Houngbo, coordonnateur de l'UNMO. 

En effet, ce petit pays d'Afrique de l'Ouest ayant une frontière commune avec le Burkina Faso, le Niger, le Nigéria et le Togo et disposant de plus de 100 km de littoral offre d'énormes possibilités en matière d'amélioration des conditions de vie de sa population. Il est déjà largement considéré comme l'un des pays les moins avancés (PMA) d'Afrique les plus stables au niveau politique. 

Le gouvernement du Bénin considère que le commerce au service du développement est la voie du développement au profit des populations pauvres, c'est pourquoi il a établi un partenariat avec le CIR pour élever le niveau de vie des Béninois et renforcer la résistance aux chocs en asseyant la présence du pays sur les marchés internationaux. 

Le Bénin s'efforce d'y parvenir en augmentant la production de produits agricoles, en portant la qualité de ceux-ci au plus haut niveau des exportations internationales et en se faisant une réputation. Il a également renforcé son environnement commercial en élaborant un cadre de politique commerciale favorable aux populations pauvres et en renforçant sa capacité de le mettre en œuvre. Le pays a en outre tiré parti du potentiel présenté par ses marchés de niche dans le cadre de l'amélioration des moyens de subsistance des Béninois les plus vulnérables, en particulier les femmes productrices et cheffes d'entreprise. Étant entouré de plusieurs pays ayant des marchés attractifs, le Bénin s'est également intéressé aux manières d'améliorer encore les partenariats et les possibilités de commerce et de coopération dans la région.

Créer des institutions solides, efficaces et flexibles au service du commerce durable 

En 2003, le gouvernement du Bénin a noué un partenariat avec le CIR et s'est lancé dans la réalisation d'une ÉDIC et d'une Matrice des actions. En parallèle, il a mené une analyse des contraintes et des possibilités, fondée sur des éléments factuels, en vue de mettre le commerce au service de la prospérité économique et de la réduction de la pauvreté. L'ÉDIC a été achevée en 2005, et une mise à jour a été effectuée 10 ans après. Ces études ont fourni une feuille de route pour progresser vers la réalisation de l'objectif consistant à aider les petites entreprises à faire du commerce et à développer des types d'emplois qui améliorent les conditions de vie et stimulent le développement économique durable. 

Des bases ont été jetées avec l'établissement d'une politique nationale de développement du commerce, d'une politique relative à la qualité, d'une politique sur la sécurité sanitaire des produits alimentaires et d'une formation sur les règles d'origine, la traçabilité, les techniques de production et l'accès au marché à l'intention des acteurs tant des secteurs public et privé que de la société civile. En outre, le programme mené conjointement par le gouvernement et le CIR a contribué à plusieurs réformes, y compris la facilitation des échanges à la frontière, des réformes au niveau des douanes et de la justice et la création du Tribunal de commerce. 

La contribution du CIR en vue d'intégrer le commerce dans le Plan national de développement 2018-2025 du Bénin a donné lieu à d'autres grandes réformes dans les secteurs commercial et industriel. Dans le secteur industriel, il s'est agi notamment d'un soutien accru à l'industrie de transformation locale par un accès facilité aux approbations du schéma de libéralisation des échanges de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) et à la taxation préférentielle communautaire de l'Union économique et monétaire de l'Afrique de l'Ouest. 

Des infrastructures régionales chargées de la qualité ont été créées et renforcées grâce au développement de la Politique nationale relative à la qualité. Des zones économiques spéciales ont maintenant été créées à la suite de la promulgation d'une loi sur le sujet. En outre, des centres techniques ont été établis concernant la transformation et le conditionnement des produits alimentaires et la construction, tandis que 33 installations industrielles ont été autorisées. 

Le secteur commercial a tiré profit d'un soutien effectif aux exportations de produits béninois, y compris des incitations à l'exportation, la levée d'obstacles non tarifaires et l'établissement d'un écosystème marchand moderne et adapté.

De la politique à l'action – tirer profit au maximum des meilleurs produits d'exportation fabriqués par des femmes

Un soutien ciblé dans des secteurs clés tels que l'ananas, le karité, la noix de cajou, le soja et le riz permet d'accroître la participation des femmes à la vie économique et de renforcer le commerce du Bénin grâce à la promotion et à la diversification des exportations.

Un exercice de recensement réalisé dans le cadre d'un projet mené conjointement par le gouvernement du Bénin et le CIR a révélé que plus de 28 000 producteurs de karité étaient des femmes. En parallèle, les chiffres des exportations font état d'une hausse de la demande internationale de karité de la part de pays comme l'Afrique du Sud, la Chine, la Corée du Sud, l'Égypte et le Japon et d'une hausse de 50% du nombre d'amandes de karité récoltées depuis 2018.

Malgré cette contribution significative, les producteurs de karité du Bénin n'avaient pas d'association nationale. Le CIR a contribué à l'établissement d'une association nationale dans la filière du karité et a fourni un soutien pour mobiliser les secteurs public et privé à travers l'Alliance globale du karité, un partenaire du CIR, et l'initiative de l'Agence des États-Unis pour le développement international (USAID). Le but était d'accroître la participation du Bénin, du Burkina Faso, du Mali et du Togo aux marchés régional et mondial du karité. À eux quatre, ces pays représentent 61% des exportations mondiales de karité.

Les entreprises de la filière du karité, principalement des coopératives de femmes formalisées, ont bénéficié de formations sur les procédures d'exportation avec la contribution du secteur privé. Elles ont également bénéficié de la construction d'une vingtaine d'entrepôts de stockage. 

Le "modèle d'accompagnement" du CIR en matière d'assistance a renforcé un autre des secteurs des produits de base du pays. Les ananas occupent la troisième place des produits agricoles du Bénin avec jusqu'à 500 000 tonnes métriques produites chaque année. Les chaînes de valeur du karité et de l'ananas, où les femmes représentent près de 80% des acteurs, constituent des sources primaires d'emplois, d'autonomisation des femmes, de revenus d'exportation, de matières premières pour l'industrie et de nourriture pour les populations locales. 

Le Bénin est aujourd'hui le quatrième exportateur d'ananas d'Afrique. Même si les exportations outre-mer ne représentent que 2% de la production totale, elles constituent la moitié des bénéfices du secteur. Le secteur a connu et surmonté d'importants revers, notamment en 2017 quand le gouvernement a arrêté volontairement les exportations vers l'UE en raison des niveaux élevés d'utilisation d'un produit chimique par les agriculteurs pour rendre jaunes les ananas pain de sucre, qui sont naturellement verts, et s'adapter ainsi aux préférences des consommateurs européens. Le gouvernement béninois a passé huit mois à résoudre le problème de l'utilisation du produit chimique. Dans le cadre de son partenariat avec le CIR, des progrès importants ont été faits pour améliorer la récolte, la transformation et la commercialisation du fruit. 

Atteindre l'excellence et se faire un nom

En 2021, l'ananas pain de sucre du Bénin s'est vu accorder le statut d'indication géographique (IG) protégée, une étiquette juridique signifiant qu'un produit provient d'une région particulière. La certification IG est de nature à accroître la valeur d'un produit de par le caractère haut de gamme qui lui est conféré. Pour le Bénin, cela renforce la promesse d'un avenir lucratif pour les agriculteurs, la branche de production et des dizaines de milliers de travailleurs du secteur de l'ananas.

Une autre étape importante pour le pays a été l'octroi du statut d'IG au gari Sohoui, une farine de gari à base de manioc cultivé dans une région particulière du Bénin et fabriquée selon des méthodes propres à la région. Le statut a été obtenu dans le cadre d'un projet mené par le CIR et dans lequel la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED) a agi en tant que sous-entité de mise en œuvre. En vue d'intégrer les IG au document relatif à la politique commerciale du Bénin, la CNUCED a travaillé avec la Direction de l'agriculture, le Ministère de l'industrie et du commerce, un groupe de femmes productrices de gari Sohoui  et plusieurs autres institutions partenaires, notamment l'Agence nationale de la propriété industrielle – qui fait partie de l'Office national de l'Organisation africaine de la propriété intellectuelle (OAPI) – et le bureau régional de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI). 

Les partenariats qui contribuent à alléger la charge de travail

Un contexte propice et la mise en œuvre de projets moteurs ont contribué à encourager de nouveaux partenariats pour renforcer le commerce au profit des populations pauvres. L'ITC, la CNUCED et l'Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI), des partenaires du CIR, ont conjointement mené, entre autres, une étude de faisabilité sur les coproduits du coton, qui était appuyée par le CIR et visait à aider le Bénin à générer des flux de revenus supplémentaires issus de la production, de la transformation et du commerce du coton. 

Le Bénin a également relevé son niveau d'engagement dans les organes commerciaux régionaux. Le pays est membre de la CEDEAO et de l'UEMOA et a bénéficié de l'initiative de la CNUCED, un partenaire du CIR, relative à la facilitation de la mise en œuvre des instruments régionaux concernant le transit, le transport et la facilitation des échanges. L'objectif consiste à simplifier les procédures transfrontières pour accroître les échanges et, ainsi, réduire la pauvreté et stimuler la production. L'allègement des procédures à la frontière pour les commerçants du secteur informel, dont la majorité sont des femmes, sera un bénéfice de taille. 

Optimisation des ressources

Depuis 2014, le CIR a injecté plus de 6,7 millions d'USD pour soutenir l'évolution du Bénin vers un commerce au service du développement durable. La confiance accordée par le gouvernement au partenariat, l'approche du CIR consistant à mettre le pays aux commandes et à montrer l'exemple au moyen de projets moteurs ont conduit le gouvernement à cofinancer certaines activités avec ses propres ressources, ce qui témoigne de son engagement dans son rôle de principale entité de mise en œuvre dans presque toutes les activités. D'après Euloge Houngbo, le résultat principal produit par le partenariat du CIR est une meilleure définition des priorités commerciales: 

"Le commerce est désormais intégré dans plusieurs politiques sectorielles. Il est de nature transversale, mais n'était pas perçu comme tel. La complémentarité entre la production, la transformation et l'accès aux marchés n'était pas envisagée."

 

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Alors que la deuxième phase du Cadre intégré renforcé (CIR) touche à sa fin en 2024, l'objectif est de produire un catalogue de récits d'impact mettant en lumière les efforts du partenariat du CIR dans les pays les moins avancés (PMA) et les PMA récemment reclassés où il s'est activement investi. Le présent récit d'impact constitue l'un des récits du catalogue. Il a bénéficié de la contribution et des commentaires essentiels de la part des Unités nationales de mise en œuvre du CIR (UNMO) basées dans les pays et de l'ensemble de l'équipe du CIR.

L'objectif premier de chaque récit d'impact, ainsi que de l'ensemble du catalogue, est d'adopter une approche journalistique en relatant l'implication du CIR dans les PMA au cours de la Phase Une et Deux. Le but est de fournir des informations pertinentes et de documenter les résultats et les impacts, ainsi que certains enseignements tirés du travail du partenariat du CIR dans les PMA. Ces récits ne fournissent pas une vue d'ensemble de tous les aspects de l'implication du partenariat du CIR, tels que les calendriers précis ou l'étendue exacte de la participation (c'est-à-dire les contributions financières). Ils constituent plutôt un moyen d'information parmi d'autres sur le travail du partenariat du CIR. Les lecteurs intéressés sont encouragés à compléter ces récits d'impact en consultant d'autres sources, notamment les Rapports annuels du CIR, les articles des Nouvelles de l'Aide pour le commerce, les canaux de réseaux sociaux du CIR et, le cas échéant, les UNMO dans les PMA ainsi que le Secrétariat exécutif du CIR.

Il est essentiel de reconnaître que les informations fournies ne sont ni exhaustives (par exemple, elles sont basées sur les dernières données disponibles au moment de la rédaction en 2023) ni de nature évaluative. 

Enfin, bien que chaque récit d'impact adhère à une structure similaire, la diversité des pays, des contextes et des implications du CIR signifie que chaque histoire est unique.

Avertissement
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