2 septembre 2020

Les coopératives aident les négociants transfrontières à maintenir leurs activités pendant la crise liée à la COVID 19

by Violeta Gonzalez Behar Toyin Abiodun / in Tribune libre

Originally published by THOMSON REUTERS FOUNDATION NEWS on 18 August 2020

Nous sommes en mars 2020 et un quart du monde est en confinement. Au Rwanda, petit pays africain sans littoral, la situation est exceptionnellement calme aux frontières. Au lieu des milliers de négociants transfrontières qui transportent toutes sortes de marchandises à pied et à vélo dans une certaine agitation, seuls les camions de marchandises sont désormais autorisés à transporter des marchandises essentielles, telles que des denrées alimentaires, entre les pays.

Ces mesures, bien que nécessaires pour contenir la propagation de la COVID‑19, ont coûté cher aux négociants, à leurs familles et aux communautés transfrontalières.

La plupart des négociants transfrontières rwandais sont des femmes et dépendent du commerce transfrontières, qui est leur seule source de revenus. Environ la moitié des négociants transfrontières rwandais sont membres d'une coopérative, ce qui leur permet d'obtenir un soutien financier, une formation, des conseils et des renseignements.

Pour maintenir leurs activités pendant la crise liée à la COVID‑19, tous les négociants transfrontières ont dû regrouper leurs produits et payer pour obtenir de la place à bord des camions qui traversent la frontière. Les négociants qui sont membres d'une coopérative ont pu non seulement mettre en commun leurs ressources pour couvrir le coût du transport de marchandises par camion, mais aussi obtenir de leur coopérative des dividendes et des prêts à court terme à faible taux d'intérêt pour les aider à traverser cette période difficile.

Il faut du temps pour renforcer la confiance dans ce nouveau système: la communication avec les partenaires commerciaux est entravée par des problèmes de réseau, le transport par camion peut endommager les marchandises fragiles, qui peuvent alors être refusées par les acheteurs, et les espèces avec lesquelles les acheteurs paient restent entre les mains des chauffeurs de camions sur le trajet du retour.

En revanche, pour les négociants qui ne sont pas membres d'une coopérative, le coût du transport de marchandises par camion est prohibitif. Même les quelques entreprises qui disposent d'un fonds de roulement suffisant ne sont pas en mesure d'exercer leurs activités, à moins que celles‑ci ne relèvent du commerce de marchandises jugées essentielles. Les négociants et leur famille comptent sur l'aide sociale pour obtenir des produits alimentaires et des médicaments.

Bien qu'il y ait heureusement eu peu de cas confirmés de COVID‑19 parmi les négociants, le commerce aux frontières rwandaises a diminué de 20 à 30%. Cela est considérable étant donné que le commerce avec les pays voisins représente 40% du commerce total du Rwanda. La situation est semblable dans toute la Communauté d'Afrique de l'Est, où le commerce transfrontières informel est omniprésent.

Les gouvernements de la région ont fait ce qu'ils pouvaient pour assurer le maintien des flux commerciaux, en exigeant le strict respect des mesures sanitaires et des mesures de sécurité, comme le dépistage obligatoire, le changement de conducteur aux frontières et la décontamination des camions. On ne saurait sous‑estimer l'importance du soutien international à la région en cette période – par le biais de l'aide au développement, de l'allégement de la dette et d'autres mécanismes.

L'un des principaux enseignements à tirer de la pandémie est le rôle important que les coopératives peuvent jouer pour aider les négociants à travailler collectivement afin de maintenir leurs activités en temps de crise.

À court terme, il sera important d'améliorer les systèmes de gouvernance et d'administration électroniques utilisés par les négociants transfrontières. Par exemple, les coopératives pourraient élire des représentants de confiance pour accompagner les marchandises en transit et faire en sorte que les paiements soient reçus et transférés par voie électronique au négociant approprié. Des contrats juridiques exécutoires entre acheteurs et vendeurs contribueraient également à accroître la confiance et la transparence.

Enfin, le renforcement des infrastructures et des capacités en matière de commerce électronique est essentiel pour garantir l'efficacité du commerce dans le monde de l'après‑COVID. Le Rwanda s'efforce de créer un avenir dans lequel les négociants pourront utiliser leurs smartphones pour échanger des renseignements sur les marchés, comme la localisation et le prix de leurs produits, ainsi que des coordonnées aux fins des négociations entre acheteurs et vendeurs. Ces technologies pourraient aussi être utilisées par les ONG pour fournir, en temps de crise, des renseignements sur la situation sanitaire et la sécurité pertinents pour les négociants et permettre à ces derniers de faire connaître leurs besoins ou leurs préoccupations en matière de sécurité.

À plus long terme, la formalisation des activités des négociants transfrontières devra être une priorité, en particulier pour aider les petits négociants à surmonter les obstacles qui les empêchent de devenir membres de coopératives.

Alors que la COVID‑19 fait rage, l'Afrique de l'Est se prépare à affronter une autre crise, à savoir l'une des plus grandes invasions de criquets depuis des décennies. On craint de plus en plus que les restrictions à la frontière n'aggravent l'insécurité alimentaire des négociants et de leurs familles et ne compromettent la capacité du pays d'atteindre l'objectif faim "zéro" inscrit dans les ODD. Aujourd'hui plus que jamais, les mécanismes de soutien collectif tels que les coopératives contribuent à ce que les communautés frontalières puissent faire face à la tempête et soient mieux à même de se relever une fois ces crises passées.

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