10 octobre 2023

Une technique de gouvernance aligne soutien au titre de l'Aide pour le commerce avec priorités du pays

by Daniel K. Kalinaki / in Nouvelles

Les pays qui reçoivent une assistance de la part de partenaires de développement afin de renforcer leurs capacités commerciales internes doivent faire coïncider ce soutien avec les structures existantes. Mettre en œuvre ces mesures d'aide sans tenir compte des initiatives en cours peut aboutir à des doubles emplois et à un manque d'adhésion. Les actions menées peuvent aussi être sans effet et devenir impossibles à maintenir.

L'Unité nationale de mise en œuvre (UNMO), mécanisme mis au point par le Cadre intégré renforcé (CIR), est un modèle opérationnel qui permet de résoudre ce problème. Ce dispositif est articulé autour des principes d'appropriation par le pays et d'interventions déterminées par la demande.

Le CIR s'emploie à renforcer les capacités institutionnelles et productives et à améliorer la coordination dans 51 pays participants, composés de pays les moins avancés (PMA) et de pays récemment retirés de la liste des PMA. Ainsi, ces pays peuvent tirer profit de l'amélioration des politiques commerciales et des conditions de l'activité des entreprises pour faire prospérer leur économie.

Une UNMO est un mécanisme servant à mettre en œuvre les priorités définies par les pouvoirs publics avec l'aide du CIR, et un bien public précieux qui peut être utilisé par différents partenaires actifs dans la sphère de l'Aide pour le commerce. L'essentiel est d'intégrer l'UNMO dans les structures gouvernementales nationales existantes. Un Comité directeur national (CDN) supervise les travaux de l'UNMO et fait intervenir nombre de parties prenantes, y compris les ministères sectoriels concernés, les organisations du secteur privé, les associations de femmes, la société civile, le milieu universitaire, les partenaires de développement de premier plan et les institutions publiques dans leur ensemble. Un partenaire de développement clé actif dans la sphère de l'Aide pour le commerce est généralement désigné par les pouvoirs publics en tant que facilitateur des donateurs, afin qu'il coordonne les travaux de l'UNMO avec les initiatives d'autres partenaires de développement, et un point focal du CIR, comme le Secrétaire permanent, est choisi pour présider le CDN et s'assurer que les hauts fonctionnaires soient informés des activités en cours et y adhèrent.

Ce large éventail de fonctions et de parties prenantes, qui peut être défini à grands traits comme les arrangements nationaux de mise en œuvre du CIR au sens général, garantit l'efficacité et l'inclusivité des initiatives de l'Aide pour le commerce.

Pour l'essentiel, les UNMO jouent deux grands rôles, avec des nuances d'un pays à l'autre. Premièrement, elles mettent en œuvre les projets et coordonnent les initiatives de l'Aide pour le commerce. Au Cambodge, par exemple, l'UNMO (dénommée Département de la coopération internationale) a collaboré avec le Fonds international de développement agricole (FIDA) pour exécuter un projet d'une valeur de 62 millions de dollars axé sur le développement accéléré des marchés inclusifs pour les petits exploitants. Le projet a été défini dans le cadre du programme à moyen terme du CIR et prévoyait d'accroître l'investissement dans le secteur du manioc.

Deuxièmement, les UNMO favorisent l'intégration du commerce en donnant des conseils techniques sur la politique commerciale aux autres acteurs des pouvoirs publics et secteurs de la société. Par l'intermédiaire des CDN, les UNMO collaborent aussi étroitement avec les partenaires de développement et les ministères des finances, du développement et de la planification. Les unités collaborent également avec les chambres de commerce, les associations professionnelles, le secteur privé et la société civile pour que le programme national en matière de commerce soit bien coordonné et inscrit dans les priorités des plans nationaux de développement.

Les UNMO sont adaptées aux contextes et aux priorités du pays, mais prennent généralement l'une des trois formes existantes. Dans le modèle "gouvernemental" ou "conventionnel" le personnel de l'UNMO est presque intégralement composé de fonctionnaires gouvernementaux rémunérés par le ministère et intégrés dans sa structure.

C'est le cas, par exemple, de la Tanzanie, où l'équipe de l'UNMO relève du Département de la politique et de la planification, du Ministère de l'industrie et du commerce. En collaboration avec le PNUD et la Banque mondiale, l'équipe a mis en œuvre des projets financés par le CIR; toutefois, l'UNMO et le CDN ont aussi dirigé des projets d'Aide pour le commerce financés sur le plan bilatéral, tels que le projet de tourisme responsable de 5,5 millions d'USD financé par le Secrétariat d'État suisse à l'économie (SECO), mené en collaboration avec le Groupe interinstitutions sur le commerce et les capacités productives sous l'égide de la CNUCED, qui a eu lieu entre 2013 et 2019.

Dans le modèle "intégré" ou "hybride", le personnel de l'UNMO est un mélange de fonctionnaires rémunérés par des fonds gouvernementaux et relevant de structures du ministère du commerce, et de personnel de projet rémunéré via d'autres fonds.

Ce modèle est en place en République démocratique populaire lao (RDP lao), où l'UNMO est une division du Département de la planification et de la coopération placée sous la direction du Ministère de l'industrie et du commerce. Dans le cadre de cette structure de gouvernance, dont l'établissement a été favorisé par le CIR, le personnel de l'unité compte environ 20 personnes, dont des fonctionnaires et du personnel affecté aux projets rémunérés au titre de différents projets de donateurs. La mutualisation de ressources dans une structure de mise en œuvre commune permet de répartir entre les différents partenaires les investissements dans les compétences spécialisées pour l'Aide pour le commerce. Par exemple, un spécialiste des finances de haut niveau peut superviser plusieurs projets, tandis que l'UNMO peut aussi investir dans un savoir‑faire transversal, comme les communications ou le suivi et évaluation, au service des différents projets en cours.

Ces modalités ont permis aux pouvoirs publics, au secteur privé et aux donateurs de mieux se coordonner. En RDP lao, l'amélioration des compétences de gestion de projet (y compris dans le domaine fiduciaire), des connaissances liées au commerce et de l'élaboration de politiques a permis de lever quelques 150 millions de dollars au profit de projets de renforcement des capacités liées au commerce.

Outre les projets du CIR, l'UNMO en RDP lao a joué un rôle clé en assurant le secrétariat du groupe de travail national sur le développement du secteur privé. Par ailleurs, elle a été essentielle à l'élaboration, à la mise en place et à la coordination des projets liés au commerce financés par différents partenaires de développement tels que l'Australie, l'Union européenne, l'Allemagne, l'Irlande, le Japon, la Corée, les Pays‑Bas, les États‑Unis et la Banque mondiale.

Dans le modèle s'appuyant sur des projets, que l'on peut trouver par exemple au Rwanda, l'UNMO est hébergée dans les locaux du Ministère du commerce, mais la majeure partie du personnel est rémunéré principalement au moyen de fonds alloués à des projets qui ne sont pas nécessairement liés au CIR. Toutefois, l'Unité assume quand même les responsabilités qui lui sont généralement attribuées dans le cadre des modèles gouvernemental et intégré.

L'UNMO du Rwanda, appelée également Unité individuelle de mise en œuvre de projets, a été créée en 2011 par le Ministère du commerce et de l'industrie (MINICOM). Elle coordonne des initiatives financées par des donateurs et liées à l'Aide pour le commerce afin d'assurer une collaboration en bonne et due forme et une durabilité à long terme. Les frais de personnel sont répartis entre les projets participants et il est prévu que les fonctionnaires soient assimilés à d'autres interventions relevant de l'unité, sans être incorporés dans le ministère.

L'Unité individuelle de mise en œuvre de projets joue un rôle essentiel pour ce qui est d'aider le Ministère à mettre l'accent sur le commerce transfrontières, le commerce électronique et le développement de la chaîne de valeur et pour ce qui est d'améliorer, pour les pouvoirs publics, le contrôle, l'appropriation et la coordination des initiatives financées par des partenaires de développement. Compte tenu des résultats obtenus par le MINICOM et d'autres projets pilotes, le modèle a produit des résultats tellement probants que les pouvoirs publics rwandais l'ont appliqué à d'autres ministères, par exemple le Ministère de l'agriculture.

Les trois modèles d'UNMO témoignent de démarches différentes en matière de besoins en personnel et de financement, en fonction du contexte et des priorités de chaque pays. Toutefois, ils ont tous pour but la mise en œuvre du projet, la coordination et la fourniture de conseils en matière de politique commerciale.

Tous modèles confondus, l'intégration des UNMO dans les structures et fonctions du gouvernement est essentielle pour garantir la durabilité des effets de l'Aide pour le commerce, au‑delà du financement du CIR.

"L'Aide pour le commerce est un sujet complexe", explique Lattanaphone Vongsouthi, qui dirige l'UNMO en RDP lao. "Chaque pays a ses propres besoins et priorités."

Mme Vongsouthi dégage trois enseignements transversaux qui pourraient être appliqués ailleurs pour mener à bien les initiatives d'Aide pour le commerce: un rôle moteur et un engagement politique forts, l'établissement de priorités, et la mobilisation du secteur privé.

"Aucune stratégie de promotion du commerce et du développement du secteur privé ne fonctionnera si nous ne la faisons pas "nôtre" et si elle ne soutient pas notre stratégie nationale de développement," a‑t‑elle déclaré. "La seule stratégie de développement axée sur le commerce valable est établie et mise en œuvre par les pays eux‑mêmes – et intégrée dans les plans nationaux."

Le secteur privé, ajoute Mme Vongsouthi, joue un rôle essentiel. "Ce sont les entreprises – et pas les pouvoirs publics – qui commercent. Ainsi, pour que cette initiative fonctionne, nous devons associer directement le secteur privé en lui demandant de nous dire où sont les problèmes, de nous aider à concevoir les solutions et – avec un peu de créativité et les incitations appropriées – de fournir une partie des ressources grâce à des partenariats entre secteur public et secteur privé."

Fin 2022, 42 UNMO dans les 51 pays appuyés par le CIR étaient intégrées dans les structures publiques. L'intégration des UNMO s'accompagne de son lot de difficultés, comme le laisse à penser clairement l'immensité de la palette des pays du CIR; la plupart du temps, il a été possible d'intégrer les UNMO, mais dans certains pays il a été plus pertinent de tenir compte du besoin de soutien de la part du CIR et d'autres partenaires de développement.

À l'avenir, les pays devront s'attacher à renforcer l'ampleur de l'intégration, à mobiliser des ressources et à intégrer le programme de travail d'Aide pour le commerce dans les projets nationaux. Une fois qu'un pays se l'est appropriée et l'a mise en conformité avec ses priorités, l'UNMO est un moteur puissant qui permet d'alimenter le commerce et la croissance économique.

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