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La Zone de libre‑échange continentale africaine (ZLECA) a pour vocation de créer un marché continental intégré pour les marchandises et les services et de favoriser la circulation des capitaux et des personnes physiques. Elle devrait renforcer la compétitivité, promouvoir le développement industriel par la diversification et le développement des chaînes de valeur régionales et promouvoir un développement socioéconomique durable et la transformation structurelle.
Ces grands objectifs de développement sont particulièrement importants pour les 32 pays les moins avancés (PMA) qui figurent parmi les 55 États membres de l'Union africaine (UA) engagés dans cette initiative.
La ZLECA est négociée en deux phases. Le commerce des marchandises et des services et le règlement des différends sont négociés au cours de la phase 1. Les négociations de la phase 2 porteront sur l'investissement, la politique de concurrence et les droits de propriété intellectuelle. L'Accord est entré en vigueur le 30 mai 2019, date à laquelle 22 États membres avaient déposé leur instrument de ratification.
Les négociations en cours ont une importance capitale pour les PMA
Bien que les négociations aient considérablement progressé, il n'est toujours pas possible de commercer dans le cadre de la ZLECA. La raison en est que les négociations sur les concessions tarifaires préférentielles et les règles d'origine ne sont pas encore achevées et qu'il s'agit là de prescriptions minimales pour une zone de libre‑échange.
Pour les PMA, les négociations en cours sont cruciales. D'aucuns s'inquiètent de la perte de recettes tarifaires qui pourrait résulter de la libéralisation, malgré le faible niveau des échanges intra‑africains. Et les droits à l'importation sont également une mesure très efficace pour protéger la branche de production nationale de la concurrence des importations.
La géométrie variable et le traitement spécial et différencié sont deux principes de base des négociations de la ZLECA. Les États membres sont convenus de libéraliser 90% des lignes tarifaires. Le délai convenu pour atteindre ce niveau d'ambition est de dix ans pour les PMA et de cinq ans pour les autres pays.
Sur les 10% de lignes tarifaires restantes, 7% peuvent être désignées comme sensibles et 3% peuvent être exclues de la libéralisation. Les PMA élimineront les droits de douane sur les produits sensibles sur une période de 13 ans. Ils peuvent reporter ces réductions – en maintenant effectivement leurs droits actuels pendant les cinq premières années. Les pays autres que les PMA ont dix ans pour éliminer les droits de douane sur les produits sensibles; ils peuvent aussi retarder la libéralisation en ne commençant les réductions tarifaires que la sixième année. Tant les PMA que les autres pays peuvent exclure 3% des lignes tarifaires, mais les produits exclus ne doivent pas représenter plus de 10% de leur commerce total.
Un groupe de six États membres (le G-6), composé de cinq PMA (Éthiopie, Madagascar, Malawi, Soudan, Zambie) et du Zimbabwe, ont invoqué le principe du traitement spécial et différencié. Ils ont fait valoir qu'ils sont confrontés à des défis de développement spécifiques et ont réussi à obtenir une période de réduction progressive de 15 ans. La répartition des 10% de lignes tarifaires restantes entre produits sensibles et produits exclus reste à convenir.
Cette liste n'inclut évidemment pas tous les PMA faisant partie de la ZLECA et ne comprend pas l'Angola et Sao Tomé‑et‑Principe, qui devraient sortir de la catégorie des PMA en 2021 et 2024, respectivement.
Les États membres sont convenus de libéraliser 90% des lignes tarifaires. Le délai convenu pour atteindre ce niveau d'ambition est de dix ans pour les PMA et de cinq ans pour les autres pays.
Les États membres ont identifié cinq secteurs de services prioritaires ‑ services financiers, communications, transports et services aux entreprises, et tourisme. Des engagements spécifiques pour ces secteurs doivent encore être négociés et un cadre de coopération réglementaire doit être convenu.
Les services sont de plus en plus importants, y compris pour les PMA, du point de vue de leur contribution à l'activité économique, à l'emploi et au commerce. Les services financiers, les services de communication et les services de transport participent de toutes les activités économiques et peuvent contribuer à améliorer la compétitivité de l'économie dans son ensemble.
Qui plus est, les services sont également importants pour la facilitation des échanges. Par exemple, l'harmonisation des réglementations en matière de transport, telles que les limites de charge par essieu, pourrait réduire les coûts liés au transport du commerce intra‑africain et avec les partenaires mondiaux.
Pour aider les PMA à développer leurs capacités réglementaires et institutionnelles nationales dans le secteur des services, la ZLECA devrait prévoir des engagements en matière de soutien.
La ZLECA: un projet phare de l'Union africaine
La ZLECA n'est pas seulement une zone de libre‑échange, c'est aussi un projet phare de l'UA.
La série de projets phares de l'Agenda 2063 inclut le PIDA (Programme de développement des infrastructures en Afrique, l'AIDA (Développement industriel accéléré de l'Afrique) et le BIAT (Plan d'action pour l'intensification du commerce intra‑africain). Ces projets peuvent jouer un rôle important dans le développement et la diversification des économies africaines, en attirant les investissements étrangers directs et en réduisant les coûts du commerce entre pays africains. Il s'agit, avec la ZLECA, d'initiatives complémentaires à l'appui du programme de transformation et de développement de l'Afrique.
Plusieurs autres initiatives ont été lancées pour soutenir la ZLECA. Afreximbank – la plus grande banque commerciale d'Afrique – a mis en place une facilité de financement de 1 milliard de dollars EU pour soutenir l'ajustement lié à la libéralisation du commerce et compenser la perte de recettes tarifaires résultant de l'application de la ZLECA.
Dans certaines communautés économiques régionales, il n'est pas rare que certains États membres réintroduisent des droits de douane qui ont été libéralisés, lorsque les entreprises nationales sont confrontées à des difficultés. Cela sape la gouvernance commerciale fondée sur des règles et peut être évité par l'accès à une facilité d'ajustement ou à des mesures correctives commerciales et mesures de sauvegarde prévues par la ZLECA.
Un système panafricain de paiement et de règlement (PAPSS) – système à l'échelle du continent développé par Afreximbank en collaboration avec l'UA – a également été lancé. Cette plate‑forme vise à internaliser les paiements intrarégionaux. Cela pourrait permettre au continent d'économiser plus de 5 milliards de dollars US par an en coûts de transaction de paiement.
Afreximbank – la plus grande banque commerciale d'Afrique – a mis en place une facilité de financement de 1 milliard de dollars EU pour soutenir l'ajustement lié à la libéralisation du commerce et compenser la perte de recettes tarifaires résultant de l'application de la ZLECA.
La Banque s'est également engagée, en collaboration avec des donateurs internationaux, à soutenir des centres d'assurance-qualité pour aider les États membres à se conformer aux normes et règlements techniques internationaux. Il s'agit là d'une contribution très importante pour soutenir le développement de la capacité de production et faire en sorte que les produits répondent aux normes qui sont essentielles pour accéder aux marchés d'exportation.
Un régime commercial simplifié pour la ZLECA doit également être élaboré. C'est un point très important, compte tenu en particulier du nombre très élevé de commerçants informels, dont beaucoup sont des femmes.
L'intégration restera un processus complexe
La ZLECA suscite un intérêt considérable sur le continent et dans le monde. L'intégration est une bonne chose pour l'Afrique, et la ZLECA est un pas important vers la réalisation de cet objectif. Mais l'intégration de partenaires inégaux est un processus complexe et difficile, comme en témoigne l'expérience d'intégration des communautés économiques régionales africaines.
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Trudi Hartzenberg est Directrice exécutive du Trade Law Centre (TRALAC).
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