19 octobre 2021

Pourquoi l'investissement étranger direct est déterminant pour favoriser une reprise durable en Afrique, par Ratnakar Adhikari

by Ratnakar Adhikari / in Tribune libre

 

Initialement publié le 19 août 2021 par le Forum économique mondial

  • La pandémie de COVID‑19 a réduit les flux d'investissements étrangers directs, ce qui a énormément coûté aux économies africaines.
  • En Afrique, divers secteurs sont susceptibles d'attirer de nouveaux investissements et de contribuer à la reprise économique.
  • Un soutien est nécessaire pour aider l'Afrique à promouvoir et faciliter les investissements.

La combinaison du ralentissement économique mondial qui a suivi la pandémie de COVID‑19 et des mesures prises par les gouvernements africains pour freiner la propagation de la pandémie a entraîné des baisses importantes de l'investissement étranger direct (IED) et de fortes contractions économiques.

Selon le Rapport sur l'investissement dans le monde, l'IED mondial s'est effondré, chutant de 35% en 2020. Cette chute s'est concentrée dans les pays développés, où les flux d'IED ont diminué de 58%. Dans les pays en développement, la diminution a été relativement mesurée (‑8%), grâce à la vigueur des flux à destination de l'Asie. La répartition s'est avérée inégale d'une région à l'autre, l'Afrique enregistrant une baisse de 16%.

L'incertitude entourant les effets de la pandémie de COVID‑19 et leur persistance ont assombri les perspectives de l'IED en Afrique. Les annonces de nouveaux investissements ont chuté de 62%, tombant à 29 milliards de dollars en 2020, contre 77 milliards en 2019, et les financements internationaux de grands projets d'infrastructure ont diminué de 74%, tombant à 32 milliards de dollars. Cette évolution est préoccupante, car ces investissements sont cruciaux pour renforcer les capacités de production et développer les infrastructures, ce qui sera décisif pour favoriser une reprise durable.

Selon les Perspectives économiques en Afrique, la croissance économique du continent s'est contractée de 2,1% en 2020 et devrait revenir au taux modéré de 3,4% en 2021. Cette croissance sera portée par un rebond de l'IED et des prix des produits de base, qui se sont déjà inscrits en hausse, conjugué à la reprise du tourisme, au recul des restrictions induites par la pandémie et au déploiement des vaccinations contre la COVID‑19.

L'Afrique, une destination intéressante pour l'IED

Au cours des dernières décennies, les flux d'IED en Afrique ont évolué, à mesure que de nouvelles sources d'investissement ont émergé et que de nouveaux secteurs se sont développés. L'examen plus attentif des nouvelles possibilités offertes par cette évolution devrait constituer une priorité pour les gouvernements africains et les investisseurs qui cherchent à investir sur le continent.

La zone de libre‑échange continentale africaine (ZLECAF) a donné un nouvel élan bienvenu au commerce et à l'investissement sur le continent et les a rendus plus prévisibles. Elle devrait favoriser les investissements intra‑africains dans la création de capacités, grâce à son effet positif sur le commerce intra‑africain. L'adoption attendue du Protocole sur l'investissement durable de la ZLECAF pourrait, à long terme, favoriser davantage encore les flux d'IED vers l'Afrique et à l'intérieur de l'Afrique.

L'IED vers l'Afrique, qui a longtemps été concentré dans les activités extractives, se diversifie de plus en plus, touchant maintenant le secteur manufacturier et les services. Entre 2006 et 2010, les projets d'extraction de ressources et de transformation de pétrole et de charbon ont représenté plus de la moitié des projets d'IED dans la création de capacités annoncés en Afrique, estimés à 236 milliards de dollars; or entre 2016 et 2020, les nouveaux projets dans ces secteurs ont représenté moins d'un quart du total. Les autres secteurs qui ont continué d'attirer d'importants nouveaux investissements sur le continent sont les secteurs de la logistique, des communications, des services informatiques et des énergies renouvelables. Aussi l'Afrique doit‑elle exploiter ces tendances à l'avenir.

Possibilités d'IED pour une reprise économique durable

Dans les années à venir, l'investissement sur le continent africain devrait dans l'idéal s'orienter principalement vers les principaux secteurs et créneaux qui seront décisifs pour la croissance du continent à court et à long terme. Certains méritent d'être mis en avant:

Énergies renouvelables. La capacité de l'Afrique pourrait atteindre 310 GW d'ici à 2030, ce qui propulserait le continent au rang de premier producteur mondial d'énergies renouvelables. L'Afrique dispose d'une marge de manœuvre importante pour construire un continent résilient face au changement climatique et faiblement émetteur de carbone, qui offre des possibilités d'investissement intéressantes dans les énergies renouvelables.

Commerce électronique et logistique. Avec le renforcement de l'activité économique du continent que devrait induire la mise en œuvre de la ZLECAF, le taux de pénétration des services mobiles et d'accès à Internet devrait s'établir à 50% en 2025, année où les dépenses croissantes des consommateurs devraient atteindre 2 100 milliards de dollars. Malgré cela, les entreprises n'ont encore que très peu exploité le potentiel du commerce électronique en Afrique subsaharienne, en raison de problèmes d'infrastructure et de logistique, qui représentent un créneau très porteur pour l'investissement étranger.

Tourisme durable. En 2019, le secteur du tourisme a représenté environ 7% du PIB de l'Afrique, sa contribution à l'économie africaine se chiffrant à 169 milliards de dollars. Le Fonds monétaire international a anticipé pour 2020 une baisse de 12% du PIB réel des pays africains dépendant du tourisme. Cependant, ici aussi des possibilités s'offrent. L'essor de la classe moyenne et le lancement de la ZLECAF devraient induire une augmentation des voyages vers le continent et à l'intérieur de celui‑ci. Nous avons le plus grand intérêt à nous intéresser au tourisme durable, y compris l'éco‑tourisme, qui peut assurer un avenir durable au tourisme africain.

Économie circulaire. Le partage, la réutilisation, la réparation, le recyclage et la régénération des matériaux, pour créer de la valeur économique et promouvoir la durabilité environnementale, sont susceptibles d'attirer énormément d'IED en Afrique. Parmi les cinq domaines thématiques identifiés par l'Alliance africaine pour l'économie circulaire et le Forum économique mondial, à savoir les systèmes alimentaires, le conditionnement, l'environnement bâti, l'électronique, et la mode et les textiles, les systèmes alimentaires circulaires peuvent à eux seuls contribuer à créer une industrie d'une valeur de 1 000 milliards de dollars d'ici à 2030, tout en créant des millions d'emplois dans une économie verte et inclusive.

Soutien nécessaire pour promouvoir l'IED en Afrique

La pandémie de COVID‑19 a fourni une occasion unique de reconsidérer l'engagement des investisseurs sur le continent africain. S'il importe d'améliorer le climat des affaires en vue d'attirer l'IED, renforcer la capacité des organismes de promotion de l'investissement en matière de promotion et de facilitation de l'IED serait très utile pour aider le continent à mieux se redresser, a fortiori pour les 33 pays les moins avancés (PMA) du continent.

À cette fin, le Cadre intégré renforcé et l'Association mondiale des organismes de promotion de l'investissement ont établi un programme ciblé visant à soutenir activement les organismes de promotion de l'investissement des PMA (dont 15 sont en Afrique). Ce programme renforce les capacités des professionnels de l'investissement et du commerce des PMA, en prenant en considération les besoins divers des différents PMA en matière de mobilisation et de facilitation de l'IED dans le contexte de cette crise sans précédent liée à la COVID‑19.

L'IED vers l'Afrique fait face à de forts vents contraires à court terme, les risques de ralentissement étant importants. Il existe, maintenant plus que jamais, pléthore de possibilités pour montrer que l'investissement privé peut conduire à un développement durable bénéficiant d'une large assise, tout en offrant d'importants retours sur investissement.

 

Credits

Originally published by the World Economic Forum on 19 August 2021

 

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