Les États insulaires de l'océan Pacifique élaborent conjointement des normes commerciales respectueuses de l'environnement tout en érigeant des digues contre la hausse du niveau de la mer provoquée par les changements climatiques.
L'infrastructure qualité en tant que point de départ pour la durabilité
Lorsque les cyclones tropicaux balaient la nation insulaire du Vanuatu, dans le sud de l'océan Pacifique, ils laissent souvent derrière eux destruction, dévastation et inondations. Cet archipel de 80 îles, situé à l'est de l'Australie, est confronté à une menace existentielle découlant de l'élévation du niveau de la mer causée par les changements climatiques.
Pour lutter contre la montée des eaux, une nouvelle digue a été construite le long de la côte de Port‑Vila, la capitale. En plus d'une promenade piétonne longeant le bleu resplendissant de l'eau et les appontements d'embarcations de tourisme, la digue a aussi créé des espaces commerciaux pour l'artisanat local et les entrepreneurs du secteur touristique. Elle a également donné naissance à de magnifiques aménagements que les populations locales utilisent tous les jours pour leurs loisirs.
D'une certaine manière, la catastrophe climatique a été l'occasion de mieux reconstruire. Néanmoins, un autre type d'infrastructure contribue à établir des normes qui répondent aux besoins des pays du Pacifique et sont durables pour permettre aux pays de bâtir des économies vertes, avec des biens et des services compétitifs sur les marchés mondiaux. L'infrastructure qualité est généralement comprise comme étant le système de politiques, de lois, d'institutions et de fournisseurs de services qui aident les entreprises à produire et à offrir des biens et des services de qualité et reconnus au niveau international pour satisfaire aux exigences spécifiques des marchés.
La stratégie d'Aide pour le commerce pour le Pacifique, qui est coordonnée par le Forum des îles du Pacifique, identifie les domaines cibles dans lesquels les pays de la région peuvent obtenir de meilleurs résultats en travaillant ensemble, plutôt que de manière isolée. Ces domaines incluent les services, la connectivité et le commerce électronique ainsi que l'expansion des marchés. La stratégie d'Aide pour le commerce pour le Pacifique 2020‑2025 a défini l'infrastructure qualité comme étant une priorité pour la promotion du développement durable.
Le Cadre intégré renforcé (CIR), qui aide les pays en développement à jouer un rôle plus actif dans le système commercial mondial, a soutenu le développement de l'infrastructure qualité en cofinançant l'initiative sur l'Infrastructure de qualité pour le Pacifique.
Compte tenu de la vulnérabilité de la région face aux phénomènes météorologiques extrêmes et aux changements environnementaux défavorables, les investissements dans l'infrastructure qualité peuvent s'avérer payants à bien des égards. Ils peuvent permettre de garantir que l'infrastructure matérielle est construite avec des matériaux de qualité qui résistent mieux aux phénomènes météorologiques graves, comme en témoigne la digue de Port‑Vila. L'infrastructure qualité contribue aussi à rendre l'empreinte environnementale plus positive et encourage dans le même temps l'élaboration de normes plus rigoureuses et plus harmonisées, permettant aux produits d'accéder aux principaux marchés mondiaux.
En règle générale, les instances qui œuvrent dans le domaine de l'infrastructure qualité, telles que les organismes de normalisation, établissent des critères pour des processus de production respectueux de l'environnement. Cela encourage l'innovation et renforce la compétitivité commerciale. L'Organisation internationale de normalisation (ISO) élabore des normes applicables aux processus de production. Le secteur privé établit aussi des normes en matière de durabilité environnementale, telles que les certifications Fairtrade, Rainforest Alliance, Forest Stewardship Council, Marine Stewardship Council et diverses certifications biologiques adaptées aux différents marchés de destination.
En outre, pour évaluer la conformité, les laboratoires et les organismes de certification et d'accréditation indépendants favorisent la confiance entre les vendeurs et les acheteurs, ce qui est très important pour promouvoir le commerce. Par exemple, les pays qui fabriquent des produits dûment certifiés comme étant biologiques, respectueux des forêts et exempts de pesticides et de toxines connaissent une demande de plus en plus importante.
Compte tenu de la petite taille de la population et des économies, une approche régionale concernant l'infrastructure qualité est particulièrement importante pour les pays insulaires du Pacifique. La mise en place de systèmes nationaux à part entière serait impossible et nécessiterait des investissements et des ressources considérables, tandis qu'une approche régionale permet d'optimiser les ressources en harmonisant les normes et les procédures d'évaluation de la conformité, et facilite les échanges régionaux et internationaux de produits et de services.
L'initiative, qui est l'élément central de l'infrastructure qualité régionale, a donné lieu à la création du Comité des normes des îles du Pacifique, qui est chargé d'élaborer et d'harmoniser les normes régionales, y compris en ce qui concerne le bâtiment et les travaux publics. Le Comité travaille actuellement sur une norme régionale concernant l'efficacité énergétique des bâtiments, sur la base d'une norme de la Nouvelle‑Calédonie.
Cette norme, qui peut être consultée librement par tous les membres du Forum des îles du Pacifique, sera un point de référence pour les codes du bâtiment nationaux. Elle place la barre haut en matière de performance énergétique et promeut les pratiques de construction durables dans toute la région. Cela encouragera la construction de bâtiments plus respectueux de l'environnement et plus économes en énergie. Les travaux futurs du Comité viseront à réduire au minimum les déchets de construction et à encourager l'utilisation de matériaux naturels et le recours à des pratiques de construction durables.
Le commerce et l'environnement au‑delà de l'infrastructure qualité
Le besoin de tisser des liens entre le commerce et l'environnement va au‑delà de l'infrastructure qualité. La crise environnementale présente des menaces existentielles, y compris l'élévation du niveau de la mer, l'acidification, la perte de biodiversité et la destruction des habitats. Ces phénomènes ont des conséquences économiques graves, telles que l'augmentation de l'insécurité alimentaire et l'endommagement des infrastructures.
Le commerce pouvant exacerber les problèmes environnementaux, les politiques y relatives doivent être adaptées pour réduire les effets préjudiciables. Parmi les mesures qui peuvent être adoptées, on peut par exemple mentionner la promotion du commerce des biens et services environnementaux, le transfert de technologie verte, la lutte contre la pollution par les plastiques et l'élimination des subventions aux combustibles fossiles. En définissant des positions régionales communes, les milieux environnementaux et commerciaux peuvent faire en sorte que le point de vue de la région du Pacifique soit pris en compte sur la scène mondiale.
En retour, ces milieux devraient donner la priorité aux politiques qui favorisent la compétitivité commerciale tout en protégeant l'environnement. De plus en plus de personnes dans le monde exigent une durabilité environnementale, et les pays qui ne sont pas en mesure de démontrer que leurs biens et services répondent à ces exigences finiront par perdre en compétitivité.
En plus d'organiser la défense, nous pouvons appliquer une stratégie d'attaque en mettant l'accent sur le recyclage et l'économie circulaire, en mettant en œuvre des incitations à la transition vers des produits et des processus de production plus respectueux de l'environnement et en tirant parti de l'Aide pour le commerce pour soutenir les liens entre le commerce et l'environnement.
À cette fin, en 2024, le Forum des îles du Pacifique organisera un atelier régional à l'intention des fonctionnaires chargés des questions commerciales et environnementales, dans le cadre duquel un échange sur les travaux de recherche universitaire, les expériences et les meilleures pratiques en matière de développement durable aura lieu et une feuille de route pour un programme commun sera établie.
Les difficultés posées par la crise environnementale sont particulièrement marquées dans les petites îles du Pacifique. Nous devons donc prendre des mesures audacieuses et décisives pour remédier à ces problèmes, y compris en cherchant à obtenir un soutien financier et technique de la part de la communauté mondiale du développement.
En travaillant ensemble, les digues que nous construisons contre la hausse du niveau de la mer peuvent devenir des ponts vers un avenir dans lequel le commerce durable sera adapté à un environnement en mutation et fondé sur un ensemble commun de normes et d'institutions de soutien de qualité.
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