Le Président du Comité directeur du Cadre intégré renforcé (CIR) aborde la question des priorités des donateurs, de la création de conditions propices à l'investissement dans les PMA, et autres.
Comment les pays donateurs tels que le Danemark peuvent‑ils soutenir au mieux les pays les moins avancés (PMA) en ces temps économiques incertains?
Les PMA représentent seulement 1% des exportations mondiales, voire moins. Dans une certaine mesure, les chaînes de valeur mondiales sont perturbées et la tendance est actuellement à la régionalisation de ces chaînes. En outre, la croissance tend à ralentir. En tant que donateurs, nous pensons qu'il faut privilégier davantage les secteurs des PMA dans lesquels il existe un réel potentiel d'exportation et c'est pourquoi j'entends choisir les secteurs dans lesquels nous œuvrons.
C'est aussi pour cette raison que nous considérons que le travail de diagnostic du CIR en matière de commerce est important. Nous sommes d'avis que le CIR est unique dans le sens où il n'existe aucun autre acteur international axé exclusivement sur les PMA et le commerce. Cet axe est important pour nous, au même titre que l'intégration des politiques commerciales dans les politiques publiques, le renforcement des capacités et les projets en collaboration avec les secteurs de production.
Quelles sont les priorités du Danemark en matière de soutien aux PMA?
Ce qui compte pour nous, c'est d'agir en faveur des PMA. Il nous importe de soutenir des projets et des activités qui ont trait non seulement à la production, mais aussi au développement. La durabilité est primordiale. Il s'agit essentiellement de créer cette durabilité et de stimuler la croissance – et pour ce faire, la création d'emplois décents est un élément de poids.
L'Aide pour le commerce, telle qu'elle est menée dans le cadre de l'assistance que nous fournissons, fait partie intégrante du développement du secteur privé. Certains donateurs disposent de départements et de politiques qui y sont spécialement consacrés mais nous, nous l'avons intégrée dans notre politique de développement du secteur privé. Presque tous nos programmes bilatéraux ont des composantes liées aux chaînes de valeur et certains sont aussi axés sur les exportations et le commerce. D'autres soutiennent les chaînes de valeur dans les pays. Mais nous ne faisons pas vraiment de différence entre le développement du secteur privé et l'Aide pour le commerce.
Considérez‑vous que le soutien des donateurs aux PMA prend une tournure particulière?
Quand l'Examen global de l'Aide pour le commerce est paru en 2017, nous avons été un peu déçus d'apprendre que le soutien des donateurs en faveur de la facilitation des échanges et de l'économie numérique était limité, y compris de la part du Danemark. Nous savons que le numérique est prometteur mais, là encore, tout est question de priorités.
Quand nous considérons l'Aide pour le commerce et que nous réfléchissons aux priorités, nous avons aussi à l'esprit les objectifs de développement durable (ODD) à l'horizon 2030. Nombre d'activités peuvent favoriser la réalisation des ODD mais nous avons été étonnés de constater que seul un petit nombre de donateurs soutenaient la facilitation des échanges et le commerce numérique. La facilitation des échanges est à présent sur la bonne voie mais l'aide à l'économie numérique reste à la traîne – c'est en tout cas mon ressenti.
Qu'en est‑il du secteur privé? Pensez‑vous que des solutions peuvent en émaner?
Tout le monde a conscience que l'engagement du secteur privé est essentiel. Nous, en tant que donateurs, et les entreprises multinationales, nous avons tous une responsabilité. Et les pays d'accueil eux aussi ont une grande responsabilité, qui est de créer les cadres adaptés, de protéger l'investissement étranger direct (IED) et de veiller à ce que leurs marchandises soient accessibles. C'est la seule façon de développer les activités commerciales dans les pays. Les pays d'accueil doivent être disposés à ajuster leurs politiques nationales pour faire une place à l'IED et l'attirer.
La libéralisation fait aussi partie de cette démarche. Je préside le Groupe de travail de l'accession de l'Éthiopie à l'Organisation mondiale du commerce (OMC). L'Éthiopie souhaiterait devenir Membre de l'OMC et a entrepris un long processus de modification de ses propres systèmes et de libéralisation – nous entamons actuellement les négociations et sommes engagés sur une voie très constructive.[1]
Les mesures de protection de l'environnement sont‑elles une préoccupation importante sur le plan mondial? Comment s'intègrent‑elles au soutien que le Danemark fournit aux PMA?
Notre gouvernement vient de faire voter par le Parlement une nouvelle loi sur le climat visant à ce que le Danemark réduise ses émissions de 70% d'ici à 2030. Le Danemark ouvre la voie. Les coûts vont être élevés mais cette démarche n'est durable que si d'autres pays prennent eux aussi des mesures.
Cependant, nous devons aussi penser "climat" dans nos relations extérieures; en collaboration avec quelques autres pays, nous cherchons des possibilités de collaboration conjuguant commerce et climat. Ce point de vue est plus novateur mais il faut aussi voir la situation dans son ensemble. En prévision de la Conférence ministérielle de l'OMC au Kazakhstan, nous devons alimenter les débats. Nous devons nous pencher sur la question, faire preuve d'initiative, prendre des risques et engager des fonds.
Si on regarde le secteur privé, on voit que ceux qui investissent sur ces marchés ont des idées. Espérons qu'ils feront le rapprochement. Les possibilités d'investissement d'impact ne manquent pas. Je suis sûr que notre gouvernement, quand il définira ses priorités en matière de développement pour les prochaines années, tiendra à mettre l'accent sur l'adaptation aux changements climatiques et l'atténuation de leurs effets; nous devrons faire de même dans notre politique de développement. Toutefois, cela ne marchera pas si les donateurs sont les seuls qui agissent. Nous devons donc montrer et voir des initiatives engageantes de la part des pays en développement.
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[1] La réunion du Groupe de travail de l'accession de l'Éthiopie à l'OMC s'est tenue le 30 janvier 2020, après une suspension de huit ans.
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