30 septembre 2020

Investir dans les petites entreprises de Gambie

by Deanna Ramsay / in Récit d'expérience

Une fabricante de sacs à main artisanaux fait progresser son entreprise et reçoit un nouveau financement

Environ 20% des petites entreprises font faillite la première année, et ce pour diverses raisons qui vont d'une structure d'entreprise défectueuse à une commercialisation inefficace en passant par un manque de capitaux.

Par ailleurs, les femmes qui créent des entreprises se trouvent confrontées à toute une série d'obstacles supplémentaires, et notamment à la difficulté de trouver du financement.

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Cependant, les petites entreprises sont également l'épine dorsale des économies du monde entier, et ces entreprises sont encore plus essentielles pour les économies moins développées.

Par conséquent, si l'objectif est de soutenir les petites entreprises, les femmes et les économies en difficulté, il est tout à fait logique de se concentrer sur la création de capital pour les entreprises détenues par des femmes dans les pays en développement.

C'est ce que tente de faire la Gambie.

À l'échelle locale

"Nous disons que l'investissement providentiel est un sport local, ce qui signifie que lorsque vous investissez dans une petite entreprise, vous devez connaître l'environnement dans lequel vous investissez, vous devez connaître le secteur et être disponible pour un soutien pratique, de sorte qu'il est essentiel d'être de la place. Tous nos investisseurs providentiels sont originaires de Gambie, et il y a même quelques Gambiens de la diaspora", a déclaré Adram Ndione, directeur du Gambia Angel Investors Network (GAIN).

Le réseau de 14 "anges" s'est formé l'année dernière et a récemment fait son premier investissement après une série de présentations. La bénéficiaire est Adiatou Conteh, propriétaire de Daraja Ltd. Mme Conteh conçoit des sacs sur mesure faits à la main avec du cuir traité localement par des tanneuses; elle vend ses créations dans sa boutique concept du centre touristique de Sénégambie, ainsi que sur son site web www.darajaboutique.com.

"L'idée de départ était d'avoir une plate‑forme pour les artisans sur les marchés artisanaux car, en Gambie, la plupart des artisans dépendent de la saison touristique qui ne dure que de six mois par année. Je voulais leur donner une plate‑forme où ils pourraient présenter leur travail, passer au numérique et évoluer au fil du temps. Malheureusement, cela n'a pas fonctionné comme prévu, alors j'ai dû me reprendre et réorganiser mes stratégies pour voir ce qui fonctionnait vraiment – et j'ai vu que les sacs en cuir fonctionnaient", a expliqué Mme Conteh à propos des origines de Daraja.

Elle a commencé à travailler directement avec des artisans qui façonnaient du cuir et à développer ses propres créations. Elle a ensuite développé une image de marque et une activité commerciale.

Au même moment, menée par le Centre du commerce international et le gouvernement, et appuyée par le Cadre intégré renforcé, une initiative appelée SheTrades était en préparation en Gambie en vue de soutenir les femmes d'affaires comme Mme Conteh.

Présentation en progression

Abdoulie Jammeh, Secrétaire permanent adjoint au Ministère du commerce, a déclaré: "La plupart de ces entreprises ont besoin d'aide pour renforcer leurs capacités, non seulement en matière de qualité, mais aussi pour améliorer leur présentation sur le marché. SheTrades a joué un rôle majeur au cours de ces 18 derniers mois, en contribuant à améliorer la qualité et la présentation de ces entreprises."

Une partie du travail de SheTrades consiste à offrir un soutien direct aux entreprises appartenant à des femmes, en mettant à leur disposition des formations sur la planification d'entreprise, le commerce de la mode, etc.

Fiona Coleman, une experte britannique dans le domaine de la mode, travaille avec un petit groupe d'entreprises du réseau SheTrades en Gambie, dont fait partie Daraja.

"Une partie de ma formation avec les femmes consiste à leur ouvrir les yeux sur les opportunités, mais aussi les défis, de la vente sur le marché international. Par exemple, beaucoup sont habituées à créer des articles uniques destinés à la population locale, mais pas à produire une gamme coordonnée ou une production en gros. C'est une compétence et un état d'esprit différents. Elles doivent se demander: "Si je produis plus d'un article, comment faire preuve de cohérence, pour pouvoir produire en quantité et conserver la qualité? Ainsi, les entrepreneuses qui cherchent à vendre en dehors de la Gambie suivent ce conseil et s'en inspirent", a indiqué Mme Coleman.

Mme Conteh, pour sa part, souhaite se procurer des textiles de façon régulière qu'elle pourra utiliser dans ses nouvelles créations, ouvrir une nouvelle boutique et travailler avec Mme Coleman sur la sélection des couleurs qui plairont à une clientèle internationale et se commercialiseront sur le marché international.

Avec l'arrivée du financement de GAIN, elle a également un nouveau plan d'affaires.

"J'ai dû procéder à un examen de mon entreprise et de mes résultats financiers au fil des ans. En tant que créatrice, on a parfois tendance à se focaliser davantage sur les aspects créatifs de l'entreprise. Il m'a donc été très utile de me pencher sur mes comptes", a confié Mme Conteh.

"C'était le processus de diligence raisonnable et de séances approfondies concernant la gestion de mon entreprise et de mes ventes qui, selon moi, me semblait impossible à faire. C'était une bonne expérience pour moi, parce que cela m'a permis de mesurer ce que j'avais été capable de réaliser financièrement ces dernières années et de comprendre ce à quoi je voulais parvenir."

Orientation future

En ce qui concerne M. Ndione et GAIN, ils continuent de chercher d'autres petites entreprises à financer tout en travaillant avec Mme Conteh sur le ciblage stratégique des ventes dans le pays, dans la région et à l'échelle internationale.

"Être une grande marque en Gambie, c'est bien. Le Sénégal est le prochain marché le plus important; il y a beaucoup plus de concurrence, mais il est essentiel d'y être présent. Cela permet à la marque d'être reconnue en Afrique de l'Ouest, son principal marché. L'augmentation des ventes en dehors du continent est une bonne chose et permettra une reconnaissance internationale", a indiqué M. Ndione.

Parlant à la fois de SheTrades et de GAIN, il a déclaré: "Grâce à notre petite initiative, je pense que nous contribuons vraiment à changer les choses. Il ne s'agit pas seulement d'accorder des subventions, mais de lier l'argent à un véritable investissement privé qui n'est possible que lorsque l'entreprise a un potentiel de croissance durable. C'est là que votre argent et vos actions peuvent avoir un réel impact sur l'entreprise et sur le pays."

"Pour moi, il est très important d'avoir une entente où tout le monde y trouve son compte. Je pense que les produits de l'entreprise sont étonnants et qu'avec le soutien adéquat de notre réseau, Adi fera vraiment un excellent travail", a‑t‑il ajouté.

Mme Conteh continue de promouvoir ses propres idées, tout en s'adaptant au nouveau financement et à la nouvelle situation mondiale.

"Ce que nous voulons vraiment faire maintenant, c'est nous concentrer davantage sur la partie du plan visant à nous développer en ligne sur le territoire national et étendre progressivement notre marché à la région de l'Afrique de l'Ouest et à d'autres stockistes en dehors de l'Afrique pour faire de Daraja une marque de luxe internationale", a‑t‑elle déclaré.

Mais même avec une nouvelle boutique, une nouvelle marque et de nouvelles collections, Mme Conteh continue de cultiver le même esprit qui l'animait lorsqu'elle a démarré Daraja, avec son amour des arts locaux et du marché de l'artisanat.

"Chaque fois que j'avais des visiteurs qui venaient de l'étranger, je voulais simplement qu'ils repartent avec un morceau de la Gambie", a‑t‑elle précisé.

Adiatou Conteh (deuxième en bas à gauche) pose avec des investisseurs providentiels et d'autres personnes.

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Les projets de SheTrades en Zambie et en Gambie sont soutenus par l'initiative "Autonomiser les femmes, faire fonctionner le commerce" du CIR, qui vise à transformer la vie économique des femmes dans les pays les moins avancés (PMA). Dans le but d'avoir une incidence sur 50 000 femmes d'ici à 2022, l'initiative "Autonomiser les femmes, faire fonctionner le commerce" soutient également des projets en Haïti, en Éthiopie et au Burundi en partenariat avec EQUALs.

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